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Author: Olivier Ferraz

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Devenir indépendant et constituer son entreprise en Suisse

Indépendant au travail

1. Introduction

Il est relativement simple de fonder une société en Suisse. Seuls certains domaines réglementés de la Confédération (professions médicales, pédagogiques, sociales) ou des cantons (circulation, architecture, professions juridiques, …) exigent des autorisations spéciales.

Le prix à payer pour obtenir l’indépendance est élevé. Il faut savoir que malgré les aspects motivants de l’indépendance, les débuts peuvent parfois se révéler difficiles en matière financière. Celui qui s’apprête à créer une entreprise devra être conscient de la somme de travail qui l’attend. De longues journées et des nuits courtes seront au programme pour les entrepreneurs. Il faut être conscient que l’indépendance présente des risques : selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), 8,3% des indépendants ont été touchés par la pauvreté en 2019, contre 3,6% pour les employés. Celui qui ne se laisse pas intimider par ces risques dispose d’un prérequis indispensable en la matière : la confiance en soi.

Les petites et moyennes entreprises (PME) sont la colonne vertébrale de l’économie suisse, avec environ 99% d’entreprises employant moins de 250 personnes à temps plein.

2. Forme juridique de l’entreprise

Il est important d’adapter la structure juridique de la future entreprise aux différents besoins de cette dernière. En Suisse, les formes les plus courantes pour les PME sont l’entreprise individuelle, la société anonyme (SA) et la société à responsabilité limité (Sàrl).

Il y a quelques critères à considérer selon le choix de la forme juridique de la future entreprise : le capital (frais de fondation, …), le risque/la responsabilité (en principe, plus le risque de la contribution financière est grand, plus il est conseillé d’adopter une société à responsabilité limité ou une société anonyme), l’indépendance (selon la forme juridique, la marge de manœuvre est limitée), les impôts (l’imposition peut varier selon la forme de la société) et la sécurité sociale (par exemple, les propriétaires d’une raison individuelle ne sont pas assurés contre le chômage).

Il existe une pluralité de formes juridiques d’entreprises : l’entreprise individuelle, la société simple, la société en nom collectif, la société en commandite, la société anonyme (SA), la société à responsabilité limitée (Sàrl), la société coopérative, l’association et la fondation.

Au fil de cet article, il vous sera présenté les trois principales formes juridiques en Suisse : l’entreprise individuelle, la SA et la Sàrl.

3. L’entreprise individuelle

L’entreprise individuelle est la forme parfaite si vous êtes désireux de vous lancer en solo rapidement et facilement. Beaucoup d’entrepreneurs privilégient cette forme juridique car elle peut être fondée très simplement et sans frais exorbitants liés à sa création. L’inscription au registre du commerce est obligatoire seulement lorsque le chiffre d’affaires annuel dépasse CHF 100’000.00 (art. 931 CO). Le versement d’un capital de base fixe n’est pas obligatoire.

Le fondateur d’une entreprise individuelle a un statut de travailleur indépendant. Ceci signifie qu’il est en grande partie responsable de sa prévoyance. Pour obtenir le statut d’indépendant, l’entrepreneur peut déposer une demande auprès de l’AVS, au lieu où l’activité est exercée. Attention, car dans certains secteurs, notamment dans celui du bâtiment ou du transport, c’est la SUVA qui octroie le statut d’indépendant. Il est donc indispensable de se renseigner vers quel organisme il faut se tourner pour se voir attribuer le statut d’indépendant.

Le fondateur endosse également une responsabilité illimitée envers sa raison individuelle.

Le nom de l’entreprise doit comporter le nom de famille du créateur. Les autres dénominations ne sont permises qu’en complément.

Selon l’art. 957 CO, les entreprises individuelles dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas CHF 500’000.00 lors du dernier exercice ne tiennent qu’une comptabilité comportant les recettes, les dépenses et le patrimoine. A la lumière du même article, les entreprises individuelles ayant réalisé un chiffre d’affaires égal ou supérieur à CHF 500’000.00 lors du dernier exercice doivent tenir une comptabilité et présenter des comptes conformément aux règles établies dans les art. 957 ss CO.

L’entreprise individuelle est fondée une fois la prise d’une activité économique indépendante et durable.

4. La société anonyme (SA)

La SA est une société de droit commercial constituée en vue d’atteindre un but déterminé de nature économique, éventuellement en vue d’atteindre un but idéal. Elle jouit de la personnalité juridique.

La société anonyme est fondée lors de son inscription au registre du commerce, ce qui nécessite un passage préalable devant le notaire pour sa constitution.

Le capital-actions est d’au moins CHF 100’000.00. Il doit être libéré à 20% au moins. Ce capital ne doit pas nécessairement être versé en espèces, il peut être versé sous forme d’apports en nature (p.ex. biens immobiliers ou mobiliers).

Une société anonyme peut être constituée par une ou plusieurs personnes physiques ou personnes morales. Celles-ci apportent un certain capital qui est divisé en sommes partielles, plus communément appelées actions. Il faut comprendre les actions comme une sorte de droit de participation à l’entreprise comme propriétaire de celle-ci.

Avec la Sàrl, la SA est la forme juridique la plus rencontrée en Suisse, car elle offre aux petites entreprises de nombreux avantages en matière de responsabilité, de réglementation de capitaux et d’autres aspects. Seule la fortune sociale répond des obligations de la société anonyme. Cela signifie qu’en cas de faillite, les actionnaires de la SA perdent uniquement leur part au capital-actions. De plus, selon l’art. 620 CO, les actionnaires ne doivent pas répondre personnellement des dettes de la SA.

4.1. Les statuts

Toute SA doit reposer sur une base juridique propre : les statuts. Ces derniers constituent les règles fondamentales de la société et confèrent l’identité de la personnalité juridique de la SA. L’art. 626 CO indique les dispositions qui doivent impérativement figurer dans les statuts. Faire défaut de l’une de ces dispositions a pour conséquence que la société ne sera pas inscrite au Registre du Commerce.

Il est possible de prévoir d’autres dispositions facultatives, qui ne sont valables qu’à condition de figurer dans les statuts (art. 627 CO).

Le ou les fondateurs de la SA arrêtent et adoptent le texte des statuts à l’unanimité. L’adoption des statuts doit être constatée dans un acte authentique, donc authentifié par un notaire. Ce ne sont pas les statuts qui doivent revêtir de la forme authentique, mais c’est l’acte constitutif indiquant que les statuts de la SA sont ceux adoptés ce jour qui doit revêtir de la forme authentique.

4.2. La raison sociale et le but

La raison sociale est le nom donné à la société. Le choix de la raison sociale est soumis à quatre principes : le principe de la liberté, le principe de l’originalité, le principe de la véracité et le principe de la réserve de l’intérêt public. Ces différents principes ne seront pas approfondis dans cet article mais il faut retenir qu’il n’est pas possible de choisir n’importe quel nom pour la société, en particulier ceux désignant des caractères de réclame (p.ex. « Discount SA » ou « Miniprix SA »). La dénomination « SA » est obligatoire dans la raison sociale.

Concernant le but, les SA peuvent adopter tout but possible et non illicite. Par « but » on entend ce qu’une société envisage de réaliser. En d’autres termes, le but exprime l’activité économique (ou idéale) de la société.

5. La société à responsabilité limitée (Sàrl)

La Sàrl est une société commerciale jouissant de sa propre personnalité juridique, avec un capital de départ bas, convenant particulièrement aux PME et aux entreprises familiales.

Une Sàrl est créée lors de son inscription au registre du commerce. Comme pour la SA, l’authentification de la fondation doit être faite par un notaire. Selon l’art. 775 CO, la Sàrl peut être fondée par une ou plusieurs personnes physiques ou morales. Les créateurs devront par un acte authentique déclarer la création de l’entreprise, établir les statuts, constituer l’assemblée des associés et éventuellement nommer un organe de révision. En parallèle avec la SA, la Sàrl peut être fondée et exploitée par une seule personne.

Attention au nom « responsabilité limitée » qui porte à confusion, car la société est entièrement responsable de ses dettes. Puisque le capital social doit être entièrement libéré, la responsabilité personnelle de chaque associé n’est pas engagée, sauf convention contraire indiquée dans les statuts pour certains aspects.

Le choix de la raison sociale est libre, sous les mêmes réserves que pour la SA, mais l’ajout de la dénomination « Sàrl » est obligatoire (en entier ou en la forme abrégée).

5.1. Statuts

Comme pour la SA, les statuts d’une Sàrl sont fixés par la loi. Pour la Sàrl, ce sont les articles 776 ss CO qui s’appliquent.

Les dispositions obligatoires devant figurer dans les statuts se trouvent à l’article 776 CO : la raison sociale, le siège, le but, le montant du capital social et la forme à observer pour les publications de la société.

5.2. Capital de départ et capital-social

Il est obligatoire d’apporter un capital social de minimum de CHF 20’000.00. Tant les apports en espèces qu’en nature sont valables. Le capital social doit être libéré (versé) en totalité.

Lors de la création d’une Sàrl, le ou les fondateurs doivent ouvrir un compte de consignation auprès d’un établissement bancaire. Ce compte bancaire a pour fonction de garantir la disponibilité de l’argent déposé au nom de l’entreprise en formation, en l’attente de l’inscription au Registre du Commerce de la société. Après la publication de la création de la société dans la Feuille officielle suisse du commerce, les fonds sont versés sur le compte courant de l’entreprise et le compte de consignation est clôturé.

Plusieurs associés peuvent participer au capital-social. La valeur des actions d’une Sàrl doit s’élever à au moins CHF 100.00 par action (art. 774 CO).

6. Conclusion

L’indépendance est un choix qui peut donner envie, mais non sans conséquences. Il n’est pas possible de créer une société à la « va vite » et d’espérer qu’elle fonctionne. Pour avoir une société qui fonctionne, il faut prendre le temps d’analyser chaque aspect juridique, car toute décision a une conséquence.

Les trois formes juridiques de société présentées ne sont pas les seules possibles et ne peuvent peut-être pas correspondre avec vos buts. Pour cette raison il est crucial de bien se renseigner à l’avance sur les conséquences juridiques de chaque constitution de société, afin d’éviter toute complication non désirée.

Nous sommes évidemment à votre complète disposition pour tous conseils, authentifications et accompagnements durant la création de votre société.

Co-écrit par Carmen Lüdi, étudiante Bachelor en droit, stagiaire-universitaire au sein de l’Etude Ferraz

Du partenariat enregistré au mariage

Mise en valeur du mariage pour tous

Le 26 septembre 2021, le peuple suisse a voté positivement à la réforme du Code Civil, le mariage pour tous. Depuis le 1er juillet 2022, les couples de même sexe ont la possibilité de se marier et de fonder une famille en Suisse. Pour les couples déjà liés par un partenariat enregistré, la loi prévoit une procédure simplifiée de conversion du partenariat en mariage. Les couples souhaitant garder leur partenariat peuvent le faire, mais dès le 1er juillet 2022 il n’est plus possible de conclure de nouveaux partenariats enregistrés en Suisse. La loi sur le partenariat enregistré de personnes du même sexe (LPart) subsiste, mais ne s’applique qu’aux partenariats conclus avant le 1er juillet 2022.

Le mariage civil est donc ouvert à toutes et tous, indépendamment du sexe des deux conjoints, et représente le seul choix pour les nouveaux couples désireux de s’unir devant la loi.

Contrairement à l’article 181 du Code Civil, qui prévoit pour le mariage le régime ordinaire de la participation aux acquêts, le partenariat enregistré est soumis au régime ordinaire de la séparation des biens. Pour les couples mariés, il est évidemment possible de conclure un contrat de mariage prévoyant la séparation des biens de chaque époux. Ce contrat doit être authentifié par un notaire ou un officier public en fonction du canton de domicile.

1. Déroulement de la procédure

Il y a deux conditions afin de convertir le partenariat enregistré en mariage. Premièrement, il faut que le partenariat ait été inscrit au registre de l’état civil avant le 1er juillet 2022. Deuxièmement, il ne faut pas que le partenariat ait été dissous.

La procédure de conversion, qui n’est pas obligatoire et qui peut intervenir en tout temps, consiste en une déclaration des deux partenaires auprès d’un office d’état civil en Suisse. Si les deux conjoints résident à l’étranger, la demande doit être déposée auprès de la représentation suisse à l’étranger.

Après avoir déposé la déclaration, l’office d’état civil convoque les deux partenaires pour signer la déclaration de conversion d’un partenariat enregistré en mariage.

Le partenariat peut être converti en mariage selon deux modalités. La première est la conversion effectuée sans invités ni témoins, dans une salle de réunion de l’office de l’état civil. La deuxième consiste à effectuer la conversion dans un local de cérémonie officiel en présence de deux témoins majeurs et capables de discernement, avec des invités selon la place disponible dans le local.

La conversion coûte en principe CHF 75, mais peut être plus élevée selon le canton.

2. Conséquences de la conversion

Malgré les similitudes des droits du mariage et du partenariat enregistré, des différences entre les deux législations existent principalement concernant le régime patrimonial et la dissolution de l’union.

2.1. Le régime patrimonial

2.1.1. Le partenariat enregistré

En cas d’absence d’une solution conventionnelle, les relations patrimoniales des partenaires enregistrés sont régies par l’article 18 LPart qui prévoit une séparation des patrimoines des partenaires, fondée sur le régime matrimonial de la séparation de biens. Il n’y a donc aucun partage à la fin du partenariat enregistré. Ceci signifie que chacun reste propriétaire de ses biens et jouit seul d’un éventuel bénéfice réalisé, sans devoir le partager avec son partenaire. Le régime de la séparation de biens traduit la volonté des partenaires de ne pas être liés au premier plan par des rapports financiers. Tous deux conservent à cet égard une liberté économique totale.

Chacun des partenaires enregistrés est propriétaire de ses biens et peut en disposer librement. Il ou elle ne répond pas d’office des dettes du conjoint, au-delà de celles découlant de la représentation du couple ou de la famille pour les besoins courants.

Séparation de biens signifie également qu’il n’y a pas de participation à l’augmentation ou à la diminution du patrimoine de l’autre partenaire lors de la dissolution de l’union. Chacun des partenaires reprend ses biens sans devoir « égaliser » les éventuels changements de fortune qu’il a pu réaliser durant le partenariat.

Les partenaires peuvent déroger au régime ordinaire de la séparation des biens en concluant une convention selon l’article 25 LPart afin de décider de la qualification de leurs biens et du sort de leurs patrimoines en cas de dissolution de l’union. Cette convention reste en vigueur après une conversion de l’union en mariage. Elle ne peut être modifiée, après la conversion, qu’au moyen d’un contrat de mariage, devant notaire.

Il y a différentes possibilités de déroger au régime ordinaire de la séparation des biens. Les partenaires peuvent s’accorder sur le fait que leurs biens soient partagés selon les règles de la participation aux acquêts, ou conclure un accord contractuel relevant du droit des obligations.

La convention par laquelle les partenaires enregistrés adoptent un régime particulier doit être passée en la forme authentique, c’est-à-dire devant un notaire ou un officier public.

2.1.2. Le mariage

En convertissant leur partenariat, les partenaires enregistrés devenus époux sont immédiatement placés sous le régime légal des couples mariés, à savoir la participation aux acquêts, en vertu de l’article 181 du Code Civil.

A la fin de l’union, concernant la liquidation des rapports patrimoniaux au sein du couple, la situation change fondamentalement du régime ordinaire du partenariat enregistré. En effet, placés sous le régime matrimonial de la participation aux acquêts, les époux devront procéder au partage en principe à parts égales du bénéfice de l’union conjugale.

Ceci signifie que les époux partagent à la fin du mariage les économies réalisées sur les biens acquis de manière onéreuse au moyen d’économies réalisées pendant le mariage (argent, mobilier, immobilier, etc.). C’est ce qu’on appelle les acquêts. Les biens propres qui sont pour l’essentiel les biens héritiers, les donations, les cadeaux, etc., ne se partagent pas.

Parmi les possibilités offertes aux époux pour modifier ces conséquences, on retrouve principalement l’adoption du régime de la séparation des biens ou, à l’opposé, de la communauté de biens. Comme pour les partenaires enregistrés, ce type de convention doit être passé en la forme authentique, devant notaire.

2.2. La dissolution de l’union

Lors d’une conversion, les partenaires enregistrés deviennent des époux et doivent dès lors intenter un divorce pour obtenir la dissolution de leur union. Sans entrer dans les détails, on relèvera juste que le divorce est soumis à des conditions nettement plus strictes que la dissolution du partenariat enregistré.

Par exemple, le délai de vie séparée qui permet à un époux de demander unilatéralement le divorce est de deux ans, alors qu’il n’est que d’un an pour la dissolution du partenariat enregistré.

3. Conclusion

Le mariage pour tous offre aux couples de même sexe plus de choix et de moyens qu’auparavant pour organiser leur situation juridique, même si cela a pour incidence qu’une option moins lourde de conséquences que le mariage n’existe plus en droit suisse.

La conversion du partenariat enregistré au mariage est une procédure simple, peu onéreuse et accessible à toutes et tous.

D’un point de vue sociétal, cette réforme du Code Civil constitue un pas décisif vers plus d’égalité entre les couples. En effet, un seul type de couple est reconnu en droit suisse et il n’y a plus de flou à cet égard. Le mariage consacre clairement l’espace disponible pour un nouveau type d’union dans notre univers juridique.

Il est important pour tout couple désirant procéder à une conversion de son partenariat enregistré de bien se renseigner sur les conséquences que cela peu entraîner sur le plan juridique, afin de palier à toutes éventualités indésirables. Nous sommes à votre entière dispositions pour tous conseils ainsi que pour la rédactions de contrats de mariage en la forme authentique.

Co-écrit par Carmen Lüdi, étudiante Bachelor en droit, stagiaire-universitaire au sein de l’Etude Ferraz

La formation de notaire et d’avocat

formez-vous

L’adage dit que le droit mène à tout, qu’il suffit d’en sortir. Cependant, les études juridiques sont généralement entreprises pour se lancer dans une carrière de notaire ou d’avocat. Bien que les deux professions soient très différentes, la formation initiale est similaire, et ce n’est qu’après la fin des études que les étudiants doivent choisir leur orientation.

I. La formation de base

Pour devenir avocat ou notaire, le premier prérequis est un diplôme universitaire en droit. De ce fait, il n’est pas nécessaire de choisir l’option spécifique ou complémentaire « économie et droit » lors des études gymnasiales. Contrairement aux idées reçues, une telle formation préalable n’est pas en elle-même un atout. Tout dépendra essentiellement des compétences propres de l’étudiant et dans cette mesure, toute autre spécialisation lors des années de collège, gymnase ou lycée convient parfaitement.

Les étudiants en droit suivent en général un cursus universitaire de 4 à 5 ans, parfois plus, pour obtenir un bachelor et un master en droit. Le bachelor en droit est un prérequis nécessaire, mais bien souvent insuffisant, quelle que soit la carrière envisagée. En l’espace de trois ans, il aborde les bases minimales du droit civil, pénal et public. Les deux premières années sont considérées comme les plus difficiles, car elles permettent de faire un tri parmi les étudiants. En cas d’échec, ne vous découragez pas : vous pourrez repasser vos examens ou l’année. Bien que cela paraisse décourageant au premier abord, vous aurez de cette manière la possibilité d’approfondir les sujets que vous n’auriez pas (suffisamment) compris et étudiés. Il faut garder à l’esprit que les années de bachelor sont les bases sur lesquelles sera construit tout l’édifice des connaissance juridiques futures. Pour cette raison, mieux vaut s’assurer d’avoir des bases bien solides.

Les employeurs demandent en règle générale au minimum un master en droit au moment de l’entrée en fonction (la mention « un brevet d’avocat est un plus » est parfois ajoutée à la demande de candidature de certains postes). Ce diplôme complémentaire permet une certaine spécialisation si l’étudiant le souhaite ou alors une formation générale pour approfondir les sujets étudiés lors du bachelor. Le master en droit dure en général entre un an et deux ans, selon les universités et les parcours des étudiants. Certaines personnes décident également de partir à l’étranger pendant un ou deux semestres pour se familiariser avec un autre système juridique ou apprendre ou approfondir leurs connaissances d’une autre langue.

Rien ne vous empêche de faire votre master dans une autre université que celle du bachelor. De nombreux facteurs peuvent entrer en ligne de compte, comme par exemple votre intérêt dans certains cours proposés.

Aujourd’hui le master est devenu un prérequis indispensable pour la majorité des postes du milieu juridique dans la mesure où cela permet déjà d’opérer un premier tri parmi la quantité très importante de juristes arrêtés au seul bachelor. Il est ensuite évident qu’à compétences et qualifications égales, le titulaire d’un brevet augmentera encore plus ses chances de se démarquer du lot.

Bien que ceci ne soit pas obligatoire, il est recommandé de faire des stages de courte durée pendant vos études. Les vacances d’été durant environ deux mois, vous pourrez avoir la possibilité de mettre en pratique le contenu de vos cours au sein d’une étude d’avocats, de notaires, au sein du service juridique d’une banque ou d’une entreprise. Certaines grandes études proposent un stage rémunéré de deux mois après les trois ans de bachelor, mais une expérience professionnelle dans une plus petite étude est également positive.

En tant qu’avocat et notaire à Fribourg, nous recevons plusieurs candidatures par mois, voire par semaine suivant les périodes de l’année. Pour les stages universitaires, nous avons à cœur d’accueillir autant de stagiaires que possibles pour des courtes durées d’une semaine à un mois afin de leur permettre de se familiariser avec le milieu juridique. C’est aussi l’occasion en tant que recruteur de dénicher quelques perles rares parmi les étudiants qui pourrons ensuite postuler en qualité de stagiaire avocat ou notaire.

Chaque étude a ses propres critères de recrutement, basés essentiellement sur ce qu’ils attendent de leurs stagiaires. Si certains veulent s’assurer d’avoir des théoriciens hors pair qui pourront passer leurs journées à débiter des recherches juridiques au kilomètre, nous préférons pour notre part focaliser notre attention sur des personnes qui ont déjà une certaine expérience de vie et pas uniquement sur celles qui ont obtenu les meilleures notes sans rien faire d’autre de leur vie qu’étudier. Toutes expériences professionnelles préalables sont des plus, de l’administratif au service, de la vente au conseil, du fast-food au voyage. Les métiers d’avocat et de notaire sont des métiers où la culture générale, les connaissances personnelles, le vécu et surtout le relationnel sont indispensables. C’est en vivant le plus d’expériences possibles qu’on se développe positivement.

II. La spécialisation en tant qu’avocat

Pour devenir avocat en Suisse, il est nécessaire de faire un stage dans un étude d’avocats, qui dure entre un et deux ans selon les cantons (un an à Zurich, deux ans à Fribourg et Lausanne, un an et demi à Genève…).

Contrairement à Fribourg et à la plupart des autres cantons, avant de commencer le stage dans le canton de Genève, il est nécessaire de suivre une formation particulière, l’Ecole d’avocature. Ce semestre de cours supplémentaires a pour vocation de transmettre aux étudiants des connaissances approfondies sur le métier d’avocat, sur la procédure et sur certains sujets choisis. 

Lors du stage, vous apprendrez, sous la supervision d’un avocat, à mettre en pratique vos connaissances théoriques. Le stage peut être fait dans une étude, mais également partiellement dans une administration ou un tribunal.

A noter que même s’il n’est pas nécessaire d’avoir terminé son master au début du stage, il est recommandé d’avoir obtenu son diplôme. Il est également conseillé d’envoyer ses candidatures en avance, pour permettre aux études qui le souhaitent de prendre leur décision plusieurs mois avant le début du stage et pour vous permettre de vous organiser au mieux. En effet, certaines études engagent en moyenne deux ans en avance, si ce n’est plus tôt, et le fait de savoir que vous aurez possiblement six à huit mois de battements entre la fin de vos études et le début de votre stage vous permettra de postuler pour un contrat à durée déterminée pendant cette période ou de décider de prendre des vacances prolongées. Ce choix est le vôtre, bien qu’une expérience supplémentaire ne soit pas à négliger.

Oubliez les idées reçues selon lesquelles il faut postuler trois ans à l’avance sinon vous ne trouverez jamais de place. Beaucoup d’études prennent des stagiaires sous des délais bien moins longs. Il en va de même des idées selon lesquelles il faut être « fille ou fils de » pour trouver une place ou n’avoir que les notes maximums dans tous les domaines. C’est à vous et vous seul de construire votre propre succès. Après il est évident que si vous rêvez de courir un marathon il pourrait s’avérer utile d’acheter le bon matériel et de vous entrainer régulièrement pour mettre toutes vos chances de votre côté. Et bien il en va de même pour trouver un stage d’avocat. Ce n’est pas en se tournant les pouces les 25 premières années de votre vie, avec des notes médiocres et une expériences professionnelle inexistante que vous ferez frissonner les recruteurs de l’étude de vos rêves…

A la fin du stage, la personne devra passer l’examen final qui lui permettra d’obtenir le brevet d’avocat. Après l’obtention de son brevet, le candidat sera avocat !

III. La spécialisation en tant que notaire

Comme pour le métier d’avocat, le futur notaire doit faire un stage et réussir les examens pour le brevet de notaire. Cependant, la durée du stage et certaines conditions diffèrent entre les cantons.

Si à Fribourg la durée du stage de notaire est de deux ans, à Genève, les futurs notaires doivent suivre un stage de 4 ans et 3 mois. Il s’agit du stage le plus long de Suisse.

En Suisse, le nombre de notaires est en règle générale illimité. Le canton de Fribourg est particulier en ce sens qu’il est le seul à connaitre un numerus clausus limitant le nombre maximum de notaires en activité. Néanmoins, dans tous les cantons l’accès à la profession est de facto limité tout simplement par la difficulté des examens et/ou de l’accès au stage.

Dans certains cantons, comme à Fribourg ou dans le canton du Jura, le stagiaire doit être réputé avoir de « bonnes mœurs ». Il est également nécessaire que le ou la candidat(e) soit de nationalité suisse et ait l’exercice des droits civils.

Il est important de noter qu’il n’est pas possible d’officier à la fois comme notaire et avocat dans le canton de Genève ou de Vaud. En revanche, un notaire peut travailler simultanément comme avocat dans les cantons de Fribourg ou du Valais par exemple.

A la fin du stage, la personne devra passer l’examen final qui lui permettra d’obtenir le brevet de notaire. Après l’obtention de son brevet, le candidat sera notaire !

IV. Conclusion

Les études de droit peuvent s’avérer relativement longues au vu des années d’études et de la longueur du stage, en particulier dans certains cantons. Il est important de noter toutefois que les métiers de notaire ou d’avocat, bien que très prisés, ne sont pas les seuls débouchés pour une carrière juridique. Le droit est un domaine vaste, qui touche à tous les sujets de la vie.

Ainsi, des études de droit pourront mener au travail de juriste d’entreprise, mais également de conseiller juridique, de directeur de fondations, de greffier, juge ou encore clerc de notaire… Les possibilités sont grandes, souvent bien plus grandes que ce que les études de droit ne laissent paraître. Certaines personnes décident également, à la fin de leur cursus, de changer de voie. Les études de droit sont une source d’informations très importante qui nous aide à comprendre le fonctionnement de notre société et des bases juridiques solides seront à tous les coups un plus pour le développement de n’importe quelle affaire. N’hésitez pas à vous questionner et à questionner des professionnels, pour trouver la voie qui vous convient.

Indépendamment de ce que vous ferez de votre vie, peu importe le nombre de brevets, de licences ou de doctorats, rappelez-vous toujours comme l’a si bien dit Jean Gabin, « Maintenant je sais qu’on ne sait jamais (…) c’est tout ce que je sais mais ça je le sais ».

Co-écrit par Albertine Necker, étudiante Master en droit

Modifications de la Loi sur la circulation routière (1er janvier 2021)

Le 1er janvier de chaque année, de nouvelles dispositions issues d’initiatives populaires, de référendum ou de décisions du Conseil fédéral entrent en vigueur. Les modifications de la loi sur la circulation routière en font partie.

Ne soyez pas surpris si vous voyez un nouveau signe ou si une manœuvre de l’automobiliste à votre droite ne vous semble pas familière ! Vous trouverez ci-dessous les nouvelles règles importantes entrées en vigueur cette année.

I. Mesures concernant la circulation des véhicules

A partir du 1er janvier, dès qu’une voie devra être fermée sur une autoroute, les conducteurs devront laisser les véhicules roulant sur cette voie se rabattre sur la voie ouverte. Le but est d’éviter que les automobilistes se placent trop tôt sur la voie restante, pour ainsi permettre au trafic de mieux s’écouler. Si les conducteurs ne respectent pas cette règle, ils seront passibles d’une amende d’ordre.

Lors d’embouteillages, les automobilistes auront également l’obligation de former un couloir de secours : ils devront laisser suffisamment de place pour les véhicules de secours entre la voie de gauche et la voie de droite ou, sur les routes à trois voies, entre la voie de gauche et les deux voies de droite, sans toutefois aller sur la bande d’arrêt d’urgence. En cas de non-respect de cette obligation, l’automobiliste sera puni d’une amende d’ordre.

Jusqu’à présent, le devancement par la droite de véhicules sur l’autoroute n’est autorisé qu’en présence de deux files parallèles. Désormais, il sera également possible de devancer sur la droite si une file de véhicules s’est formée sur la voie de gauche ou, sur les autoroutes à trois voies, sur la voie du milieu. Cela permettra un meilleur écoulement du trafic. Il sera toujours interdit de dépasser par la droite, c’est-à-dire de se positionner sur la voie de droite pour se rabattre sur celle de gauche juste après. Cette manœuvre sera punie d’une amende d’ordre.

Il sera désormais possible de circuler avec une remorque ou une caravane (jusqu’à 3,5 tonnes) à une vitesse de 100 km/h (et non plus 80 km/h). Pour ce faire, les véhicules devront être équipés de pneus adéquats permettant de rouler à cette vitesse.

II. Mesures en faveur de la mobilité douce

Il sera désormais possible pour les conducteurs de cyclomoteurs et les cyclistes de tourner à droite au feu rouge, lorsque la signalisation les y autorise.

De plus, les enfants de 12 ans et moins pourront rouler à vélo sur le trottoir (et plus uniquement les élèves de l’école enfantine), mais uniquement en l’absence de piste ou de bande cyclable. Cette mesure permettra une meilleure sécurité des jeunes cyclistes.

Il sera désormais possible d’aménager un sas pour cycliste à l’aide de marquage au sol devant des installations de signaux lumineux. Il faudra également qu’un signalement des déviations pour la mobilité douce soit mise en place.

III. Mesures concernant les véhicules en stationnement

Un nouveau symbole « Station de recharge » est créé pour désigner les aires de stationnement équipées d’une station de recharge pour les véhicules électriques.

Des aires de stationnement pourront désormais être réservées aux cyclistes au moyen du pictogramme du vélo, sans qu’une signalisation supplémentaire ne soit nécessaire.

Les aires d’autoroutes et de ravitaillement pourront à nouveau vendre et servir de l’alcool.

Il sera désormais possible d’installer des parkings payants pour les deux-roues motorisés (c’est-à-dire pour les e-bikes rapides (45 km/h), les motocycles et les cyclomoteurs).

Dans les zones marquées en blanc, une nouvelle signalisation « rappel de l’utilisation du disque de stationnement » sera également introduite, sur demande des autorités policières.

IV. Mesures concernant l’apprentissage de la conduite en voiture

Le permis d’élève conducteur pourra désormais être obtenu dès 17 ans révolus. Les nouveaux conducteurs pourront se présenter dès leurs 18 ans à l’examen de conduite, sous réserve qu’ils aient déjà conduit pendant une période d’un an. Seuls les conducteurs âgés de 20 ans révolus pourront se présenter avant le délai d’une année à l’examen de conduite.

Une période de transition sera mise en place : en effet, les jeunes nés entre 2001 et 2003 (soit ayant entre 17 et 19 ans au moment de l’entrée en vigueur de la loi) qui se seront présentés à (et auront réussi) l’examen de conduite d’ici au 31 décembre 2021 seront exemptés de la période d’apprentissage d’une année.

V. Conclusion

Il est important de se tenir informé des différentes modifications qui entrent en vigueur chaque année, en particulier celles concernant les règles de la route. Avec l’augmentation de la mobilité douce, ainsi que des nouveaux types de voitures (électriques en particulier), de nouvelles dispositions sont ajoutées à la loi.

Une autre modification importante de cette année est l’introduction du congé de paternité en Suisse. Vous trouverez plus d’informations à ce sujet dans l’article dédié sur le blog.

Co-écrit par Albertine Necker, Etudiante Master en droit

Maison hantée et garantie pour les défauts

Après de l’achat d’une nouvelle maison, il peut arriver que les nouveaux propriétaires remarquent des évènements inhabituels, comme des odeurs, des bruits étranges ou des animaux de compagnie se comportant différemment de d’habitude. Les habitants de la maison peuvent également se sentir mal à l’aise, comme s’il y avait une présence, alors qu’à l’évidence, ils sont seuls. Quand toutes les raisons scientifiques peuvent être écartées, une explication possible est la présence d’esprits dans la maison.

Si pour beaucoup ces questions semblent purement risibles, pour d’autres elles peuvent engendrer de réels traumatismes. A une époque où science et croyance ne cessent de se rencontrer, à quand des procès en garantie pour les défauts au titre de maison hantée, spectres et autres revenants.

Le droit suisse contient des dispositions concernant la garantie pour les défauts. Particulièrement parce que l’achat d’une maison est couteux et demande beaucoup d’investissements, le fait de découvrir de tels défauts dont les corrections peuvent s’avérer longues et onéreuses est une source de désillusions importante. Pour cette raison, une action en garantie pour les défauts pourrait être intentée pour réduire le prix de vente ou pour résilier le contrat.

I. Généralités

Le contrat de vente immobilière (c’est-à-dire d’une maison, d’un appartement, d’un terrain etc…) confère des obligations à l’acheteur et au vendeur. Les obligations dites principales sont la livraison du bien par le vendeur en échange d’un prix payé par l’acheteur. Cependant, et à la suite de la vente en tant que telle, les parties au contrat ont d’autres obligations. Les plus importantes concernent la garantie pour les défauts du bien vendu.

Si l’objet de la vente présente effectivement un défaut et que les conditions sont réunies, l’acheteur peut intenter une action en garantie, permettant la résiliation de la vente ou la réduction du prix.

II. Garantie pour les défauts

A. Objet de la garantie

Au sens de l’article 197 du Code des obligations, le vendeur est tenu de garantir l’acheteur des qualités promises dans le contrat ainsi que les défauts qui enlèvent au bien sa valeur ou son utilité prévue, ou qui diminuent ces deux éléments dans une mesure importante. Il répond de ces défauts, même s’il les ignorait.

Le fait que la maison vendue soit hantée par un esprit pourrait être un défaut au sens de l’art. 197 CO. En effet, il est important pour tout propriétaire d’un logement que celui-ci soit agréable à vivre. Cependant, s’il ressent une présence ou si certains évènements étranges se produisent, le lieu et l’ambiance de celui-ci peuvent alors devenir pénibles, voire effrayants. Le bien-être des habitants est alors grandement diminué, ce qui réduit également la valeur de la maison.

B. Défauts connus et frauduleusement dissimulés

Lors d’une vente immobilière, il est important que le vendeur dise à l’acheteur quels sont les défauts connus, car sinon, il devra payer pour les réparations. De plus, si le contrat inclut une clause d’exclusion ou de restriction de la garantie, celle-ci est nulle si le vendeur a frauduleusement dissimulé à l’acheteur les défauts du bien.

Si l’acheteur avait dû s’apercevoir lui-même des défauts en examinant le bien, le vendeur ne répond alors pas non plus des défauts. Ainsi, si le vendeur dit à l’acheteur que la maison qu’il s’apprête à acquérir est hantée et que celui-ci l’achète, puis s’en plaint, le vendeur n’aura pas répondre de ce défaut, car il l’avait mentionné.

C. Vérification de l’acheteur

Pour que l’acheteur puisse se prévaloir des défauts qu’il invoque, il a l’obligation de vérifier l’état du bien aussitôt qu’il le peut et en informer immédiatement le vendeur. Cependant, certains défauts ne sont pas visibles au premier abord, comme le fait qu’un esprit ait élu domicile dans la maison. Dans ce cas et dès qu’il s’en rend compte, il doit immédiatement en informer le vendeur. S’il néglige de le faire, au moment de la vente ou lorsqu’il s’en rend compte, le bien est réputé accepté, même avec les défauts.

S’il s’avère que le vendeur a induit l’acheteur en erreur intentionnellement, il ne peut alors pas se prévaloir du fait que l’avis des défauts n’aurait pas eu lieu en temps utile. Dans notre cas de maison hantée, si le vendeur, connaissant le défaut de la maison, ne l’a pas indiqué à l’acheteur et si celui-ci n’informe pas immédiatement le vendeur, une action en garantie peut tout de même être intentée.

III. Action en garantie

S’il s’avère que le bien a un défaut et que l’avis a eu lieu en temps utile, l’acheteur peut intenter une action en garantie au sens de l’art. 205 CO. Il peut alors faire résilier la vente ou faire réduire le prix à concurrence de la moins-value. Pour que cette action puisse aboutir, il faut que l’acheteur prouve le défaut au sens de l’art. 8 CC.

A. Résiliation du contrat

L’acheteur peut décider de faire résilier le contrat. Cela signifie que les obligations non encore exécutées ne sont pas dues et que les prestations qui sont déjà effectuées doivent être restituées. Ainsi, dans le cas d’une vente immobilière, la maison doit être rendue, avec les profits possiblement retirés, et le montant payé doit être remis à l’acheteur avec les intérêts, les frais de procès et les impenses, au sens de l’art. 208 CO.

De plus, le vendeur doit indemniser l’acheteur de tout autre dommage, à moins qu’il ne prouve qu’aucune faute ne lui est imputable. Il y a faute si le vendeur conclut le contrat alors qu’il savait ou aurait dû savoir que le bien avait un défaut. Dans le cas présent, le vendeur qui n’a pas informé l’acheteur intentionnellement qu’un esprit hantait la maison a commis une faute. Il devra alors indemniser l’acheteur des différentes dépenses que celui-ci a dû faire pour, par exemple, faire venir un spécialiste ou le prix du suivi psychologique qui découle de la situation que doivent subir les nouveaux propriétaires.

La doctrine majoritaire considère que l’action rédhibitoire (c’est-à-dire en résiliation du contrat) annule le contrat de manière rétroactive, en faisant comme s’il n’avait jamais existé. Il ne subsiste alors plus d’obligations entre les parties.

B. Réduction du prix

L’acheteur a également la possibilité de réduire le prix à payer si le défaut engendre une moins-value (soit une différence entre la valeur objective du bien sans le défaut et la valeur objective de la chose défectueuse). Le contrat est alors maintenu, en réduisant le prix de vente, tout en conservant les obligations des parties.

D’après le Tribunal fédéral, la réduction, appelée indemnité pour moins-value, doit être calculée selon la méthode dite relative. Le prix convenu doit ainsi être réduit d’un montant proportionnel à la moins-value. Pour faciliter le calcul de la réduction, le Tribunal fédéral a dégagé deux présomptions. Premièrement, la moins-value est égale aux coûts de la réparation du bien. Deuxièmement, la valeur du bien supposé sans défauts est présumée égale au prix de la vente. Ceci facilite donc le calcul de la moins-value.

Un premier problème se dégage dans ce contexte. En effet, la présence d’un esprit dans une maison ou un appartement n’est pas « tangible », ce qui rend le calcul de la moins-value très compliqué. En effet, la « réparation » sous-entendrait faire purifier la maison. Cependant, il faudrait que ce soit réalisable, sans que l’on ne tombe sur un charlatan. De plus, une telle purification par un radiesthésiste peut s’avérer très couteuse et peut engendrer de nombreuses complications et heures de travail. Contrairement à une réparation ou autres décontaminations (en cas par exemple d’invasions d’insectes dans la maison) dont le prix est généralement assez similaire et déterminable selon l’expert qui les prend en charge, chasser des esprits n’est pas une pratique courante. Il peut donc être difficile d’arriver au résultat escompté et ce, à un prix raisonnable.

A noter que si le montant de la moins-value dépasse le prix de vente, la résiliation sera automatiquement ordonnée par le juge. L’indemnisation pour le dommage subi est également applicable par analogie pour la réduction du prix.

C. Problème de la preuve

Au sens de l’art. 8 du Code civil suisse, chaque partie doit prouver le fait qu’elle allègue pour en déduire un droit. La présence d’esprits est pour beaucoup due à des croyances. Il peut donc s’avérer ardu de prouver qu’une maison est hantée.

De plus, la preuve demandée doit être apportée par un expert qui doit être reconnu par le tribunal qui en admet l’expertise. Sans parler du problème des charlatans et même si la personne consultée est réellement un spécialiste, une telle preuve sera vraisemblablement difficile à apporter et à légitimer devant un tribunal.

La prise en compte de ces preuves découle du pouvoir d’appréciation du juge en charge de l’affaire et peut donc varier en fonction des sensibilités de celui-ci.

IV. Conclusion

Découvrir la présence d’un esprit dans une maison nouvellement achetée peut s’avérer être une source d’angoisses et de stress, renforcée par une action en justice qui, bien que nécessaire, pourrait potentiellement être compliquée en raison des preuves à apporter.

Pour le moment, la jurisprudence n’a jamais eu à trancher un tel cas. Cependant, au vu de la position de la majorité des personnes à ce sujet, l’aboutissement d’une action en garantie, que ce soit pour la résiliation du contrat ou en réduction du prix, serait très incertain.

Si vous vous trouvez dans cette situation, peu de solutions s’offrent à vous, si ce n’est de trouver un accord avec le vendeur, de faire appel à un spécialiste ou simplement de revendre la maison, mais attention aux défauts dissimulés…

Co-écrit par Albertine Necker, Etudiante Master en droit

Le congé de paternité et l’allocation de paternité

Le 27 septembre 2020, les Suisses ont accepté à 60,3% des voix le projet prévoyant un congé de paternité et une allocation de paternité. Les dispositions légales s’y afférant sont entrées en vigueur le 1er janvier 2021.

1. Historique

Jusqu’à présent, seul un ou deux jours de congé était octroyé au père au moment de la naissance de son enfant. Au vu des évolutions sociétales et familiales, ce congé était bien trop court du point de vue des partisans.

De ce fait, une initiative populaire avait été lancée en 2017 pour permettre aux pères d’avoir un congé paternité de quatre semaines. Cependant, ce projet avait été refusé par le Conseil fédéral. Un contre-projet a alors été lancé, prévoyant un congé paternité de deux semaines. Celui-ci a donc été accepté par le peuple et les cantons en septembre dernier.

2. Arguments en faveur de ces nouveaux droits de paternité

Ce nouveau droit concède à tous les pères actifs le même congé minimal. Bien que certaines entreprises prévissent déjà un congé de paternité, ce n’était pas le cas pour tous. Désormais, les pères auront tous le droit à un congé minimal de deux semaines.

Le congé paternité est introduit dans l’intérêt de toute la famille, car cela permet de passer plus de temps avec l’enfant, d’aider et de décharger la mère dans ses tâches et également de s’impliquer plus activement dans la nouvelle dynamique familiale. Il permettra également une meilleure répartition travail-tâches familiales entre les deux parents, ce qui donnera entre autre la possibilité aux mères de garder plus facilement leur travail après la fin des congés légaux.

Le Conseil fédéral et le Parlement sont également d’avis qu’il sera facile pour les entreprises de mettre en place ce nouveau congé et que le coût de l’allocation sera en outre supportable. Nous reviendrons sur ce dernier point.

3. Application en Suisse

Au sens de l’art. 329g du Code des obligations, en cas de paternité, le travailleur a droit à un congé de maximum deux semaines s’il est le père légal au moment de la naissance de l’enfant ou s’il le devient au cours des six mois qui suivent. Ceci permet aux pères qui reconnaissent leur enfant après la naissance de celui-ci, si les parents ne sont pas mariés, d’avoir également droit à ce congé. Concernant les parents mariés, le mari est présumé père de l’enfant par le seul effet du mariage. En revanche, ce droit ne s’applique pas au père adoptant un enfant.

Le congé de paternité doit être pris dans les six mois qui suivent la naissance de l’enfant et il peut être pris sous la forme de semaines ou de journées. Le congé peut ainsi ne pas être pris de manière consécutive, ce qui permet une conciliation organisationnelle d’autant plus facile.

Au sens des art. 16i et suivants de la loi sur les allocations pour perte de gain (LAPG), le nouveau père légal de l’enfant aura également le droit à une allocation de paternité (au même titre que l’allocation de maternité de la mère), s’il a été assuré obligatoirement au sens de la LAVS pendant les neuf mois précédant la naissance, s’il a, au cours de cette période, exercé une activité lucrative durant au moins cinq mois et si, à la date de la naissance de l’enfant, il est salarié, exerce une activité indépendante ou travaille dans l’entreprise de son épouse contre un salaire en espèces.

Cette allocation est donnée pour tous les jours de congé pris. Si le congé est pris sous forme de semaines, le père touche sept indemnités journalières par semaine et si le congé est pris sous forme de journées, le père touche, pour cinq jours indemnisés, deux indemnités journalières supplémentaires.

Le montant de l’indemnité journalière est égal à 80% du revenu de l’activité lucrative obtenu avant le début du droit à l’allocation, mais au plus CHF 196.00 par jour. Cette indemnité est versée soit à l’employeur, soit au salarié directement.

L’allocation de paternité sera financée par les cotisations des employés, des employeurs et des indépendants. La cotisation sera portée de 0,45% à 0,5% pour permettre cette indemnité. Cela correspondra alors à une augmentation de 50 centimes pour CHF 1000.00. Pour ce qui est des salariés, la moitié sera prise en charge par l’employeur.

4. Conclusion

Le congé de paternité est une avancée considérable, qui se base sur les évolutions sociétales et familiales de notre époque. Bien que pour les initiateurs du projet deux semaines ne soient pas suffisantes, ce nouveau droit paternel permettra certainement une organisation plus équilibrée au sein du couple, tout du moins lors des premières semaines.

Notons toutefois que la Suisse reste dans les derniers pays en Europe à introduire un tel droit. En effet, l’Union européenne prévoit un minimum de 10 jours de congé paternité. Cependant, les Etats membres peuvent être plus généreux, comme la France, qui a doublé le 23 septembre 2020 le congé paternité, passant à 28 jours, ou les pays nordiques, qui accordent en moyenne 60 jours de congés, payés jusqu’à 100%.

Concernant le droit d’adoption, une initiative populaire a été acceptée par le Conseil fédéral.

Le congé de paternité est donc un sujet actuel et d’avenir. La question reste ouverte de savoir si et, le cas échéant, quand la Suisse se placera au niveau de ses voisins européens.

Co-écrit par Albertine Necker, Etudiante Master en droit

La Mère Noël veut divorcer !

(ndlr : Le texte qui suit est évidemment fictif quant au fond, contrairement aux références légales qui sont parfaitement fondées en droit)

Interview exclusive : Il semblerait que depuis l’installation des époux Noël dans le canton de Fribourg, les relations ne sont plus au beau fixe au sein du couple le plus tendance de cette période de fêtes. Mme Noël souhaiterait même divorcer, voire faire annuler son mariage. Nous nous entretenons avec Me Ferraz, l’avocat du Père Noël, sur cette affaire.

(ndlr : Le texte qui suit est évidemment fictif quant au fond, contrairement aux références légales qui sont parfaitement fondées en droit)

Interview exclusive : Il semblerait que depuis l’installation des époux Noël dans le canton de Fribourg, les relations ne sont plus au beau fixe au sein du couple le plus tendance de cette période de fêtes. Mme Noël souhaiterait même divorcer, voire faire annuler son mariage. Nous nous entretenons avec Me Ferraz, l’avocat du Père Noël, sur cette affaire.

LA TRIBUNE DU PÔLE : Alors, la Mère Noël souhaite divorcer…

ME OLIVIER FERRAZ : En effet, l’avocat de la Mère Noël, Me Grincheux (oui, le nain de Blanche-Neige), a déposé lundi dernier la demande de divorce. Mon client, M. Noël, est très attristé par la nouvelle.

LTDP : Quels sont les arguments avancés par Mme Noël ?

ME F. : La Mère Noël est très remontée contre son mari, car elle estime avoir été trop longtemps délaissée par son mari durant la période précédant le mois de décembre. Son avocat invoque que le Père Noël aurait fauté en s’occupant plus de son entreprise que de sa femme. Celle-ci serait alors la victime et son mari serait coupable du fait que leur mariage ne marche plus.

Peu importe que cette allégation soit vraie. Me Grincheux semble avoir passé trop de temps dans ses mines, car le nouveau droit du divorce est entré en vigueur en 2000. Désormais, un mariage ne peut pas être dissous sur la base d’une faute que l’autre aurait commis.

Selon l’art. 114 du Code civil suisse (ci-après CC), un époux peut demander le divorce lorsque, au moment du dépôt de la demande de divorce unilatérale, les conjoints ont vécu séparés pendant deux ans au moins.

Selon l’art. 115 CC, un époux peut demander le divorce avant l’expiration du délai de deux ans lorsque des motifs sérieux qui ne lui sont pas imputables rendent la continuation du mariage insupportable.

M. et Mme Noël vivent encore dans la même maison, le Père Noël ayant son domicile à Villars-sur-Glâne avec son épouse. Ils n’ont commencé à se disputer que très récemment et ce n’est qu’en recevant la demande de divorce que mon client s’est rendu compte du sérieux de cette affaire. Le délai de deux ans n’est pas écoulé.

Pour ce qui est des motifs sérieux, bien que le Père Noël soit très occupé pendant la période des fêtes, entre la préparation des cadeaux pour les enfants, la formation des nouveaux lutins, l’entraînement des rennes qui n’ont pas volé aussi longtemps depuis presqu’un an, et la toute nouvelle brigade des garnements qui détecte tout au long de l’année si les enfants font des bêtises, on ne saurait considérer qu’un éloignement de deux mois, entre la Toussaint et le 24 décembre, puisse être considéré comme un motif sérieux, en particulier qui rendrait la continuation du mariage insupportable. Si telle est la décision de Mme Noël, il est tout à fait acceptable d’exiger d’elle de vivre séparée de son mari pendant deux ans, tout en restant mariée. Il n’est donc pas possible pour la Mère Noël de demander unilatéralement le divorce.

Si le Père Noël avait également voulu divorcer, ils auraient pu déposer une requête commune au sens des art. 111 et 112 CC. Cependant, le Père Noël souhaite sauver son mariage, alors il n’acceptera pas.

LTDP : Nous avons également appris que la Mère Noël souhaiterait faire annuler son mariage. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ? Est-ce seulement possible ?

ME F. : Me Grincheux a effectivement déposé parallèlement une demande d’annulation de mariage. Il est tout à fait possible de faire annuler un mariage, si certaines conditions sont réunies.

Selon l’art. 105 CC, le mariage doit obligatoirement être annulé

(1) lorsqu’un des époux était déjà marié au moment de la célébration et que le précédent mariage n’a pas été dissous par le divorce ou par le décès de son conjoint,

(2) lorsqu’un des époux était incapable de discernement au moment de la célébration et qu’il n’a pas recouvré la capacité de discernement depuis lors,

(3) lorsque le mariage était prohibé en raison de la nature d’un lien de parenté,

(4) lorsque l’un des époux ne veut pas fonder une communauté conjugale mais éluder les dispositions sur l’admission et le séjour des étrangers,

(5) lorsque le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d’un des époux ou

(6) lorsque l’un des époux est mineur, à moins que son intérêt supérieur ne commande de maintenir le mariage.

Aucune de ces conditions ne sont remplies pour la situation des époux Noël.

Me Grincheux se base en réalité sur l’art. 107 CC : un époux peut demander l’annulation du mariage

(1) lorsqu’il était incapable de discernement pour une cause passagère lors de la célébration

(2) lorsqu’il a déclaré par erreur consentir à la célébration, soit qu’il n’ait pas voulu se marier, soit qu’il n’ait pas voulu épouser la personne qui est devenue son conjoint

(3) lorsqu’il a contracté mariage en ayant été à dessein induit en erreur au sujet de qualités essentielles de son conjoint.

La Mère Noël estime que son mari l’aurait induite en erreur à dessein au sujet d’une de ses qualités essentielles : quand M. Noël était jeune, il était grand et athlétique. Mais il a toujours été très gourmand et depuis leur installation dans le canton de Fribourg, mon client a découvert les chocolats Villars et il est vrai qu’il a pris de l’embonpoint.

La gourmandise ne peut toutefois pas être considérée comme une qualité essentielle qui permettrait l’annulation d’un mariage. Les qualités essentielles ne peuvent pas être économiques, mais doivent être personnelles. Elles doivent être objectivement et subjectivement essentielles. La perversité ou la maladie grave incurable peuvent justifier une annulation, tout comme le fait d’avoir été condamné pour de lourds délits qui ont été sciemment cachées à l’autre fiancé.

Cependant, la gourmandise n’est pas objectivement et subjectivement essentielle et ne peut donc pas être invoquée par la Mère Noël.

LTDP : Nous vous remercions pour ces précisions juridiques. Comment voyez-vous le dénouement de cette affaire ?

ME F. : En l’état je ne peux pas me prononcer. Une requête de suspension de la procédure pour motif impérieux a été déposée afin de permettre à mon mandant, en premier lieu, de faire face aux fêtes de fin d’années. Le reste peut attendre, dans 24 jours c’est Noël…

Co-déliré par Albertine Necker, Etudiante master en droit

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L’assistance au suicide

L’assistance au suicide, ou suicide assisté, est l’acte de fournir un environnement agréable et les moyens nécessaires à une personne, pour lui permettre de mettre fin à sa vie dignement. Le terme communément admis, « euthanasie », provient du grec « eu » / « Thanatos » et se réfère à la mort agréable, douce. Le but est de donner à la personne le demandant des derniers instants agréables.

Les pratiques diffèrent d’un pays à un autre, certains autorisant complètement l’aide active au suicide (euthanasie active ou le fait de mettre fin à la vie d’une personne à sa demande), contrairement à d’autres qui refusent toute forme d’aide.

I. Application en droit suisse

A. Législation fédérale

Le suicide assisté est permis en Suisse, à certaines conditions. Au sens de l’art. 115 du Code pénal suisse, « celui qui, poussé par un mobile égoïste, aura incité une personne au suicide ou lui aura prêté assistance en vue du suicide, sera, si le suicide a été consommé ou tenté, puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire».

A contrario, toute personne ayant prêté assistance en vue du suicide pour des raisons qui ne sont pas égoïstes n’est pas punissable. Il faut également que la personne soit capable de discernement et elle doit s’administrer elle-même la dose létale.

De ce fait, le médecin qui administre au patient le médicament entrainant sa mort sera punissable, car il aura commis l’acte d’homicide. Cependant, il est nécessaire de différencier cette situation avec celle du médecin administrant un médicament à son patient dans le but d’atténuer ses souffrances, même s’il sait que cette dose sera probablement mortelle, car le but n’est pas la mort, mais bien que le patient souffre moins.

Dans les autres cas, c’est-à-dire ceux où le patient s’administre lui-même le médicament, le médecin n’est pas coupable, car le suicide n’est pas puni pénalement.

B. Application cantonale

En règle générale, ce sont des associations qui opèrent le suicide assisté, comme les associations Exit ou Dignitas, qui organisent le bon déroulement du processus et du décès. Cependant, pour que l’aide au suicide soit possible, il faut en plus que celui-ci soit conformes aux lois cantonales.

Les deux seuls cantons ayant une législation à ce sujet sont Vaud et Neuchâtel, obligeant les institutions d’intérêt public comme les hôpitaux et les maisons de retraite à accepter les suicides assistés en leur sein.

En dehors de ces cantons, les hôpitaux de Genève et du Valais ont autorisés les suicides assistés dans leurs établissements.

Dans le canton de Fribourg, il n’y a pas de règlementation explicite.

Le droit suisse concernant le suicide assisté est très flou, ce qui permet une pratique qui va en grandissant.

II. Intervention du notaire

Comme nous l’avons vu, le consentement du patient est nécessaire pour permettre le suicide assisté. Cependant, il peut arriver qu’en fin de vie, celui-ci ne puisse plus demander de manière manuscrite l’assistance de fin de vie, étant très faible. Un notaire peut alors préparer en la forme authentique le texte de la déclaration qui démontrera la volonté pleine et consciente du patient et pourra ainsi remplacer un document manuscrit du patient, indispensable.

Si le patient est également trop faible pour simplement signer le document, il est possible de prévoir une forme qualifiée en présence de deux témoins.

Pour que ces solutions soient envisageables, il est important que la capacité de discernement et le consentement du patient soient donnés. Si le plus souvent le notaire peut les constater par lui-même, il est aussi des cas où l’intervention d’un médecin s’avère indispensable.

III. Autres applications dans le monde

Toutes les législations ne s’accordent pas sur la punissabilité de l’assistance au suicide. Un grand nombre de pays considère ces pratiques comme un homicide, un assassinat ou une omission de porter secours.

Les pays les plus restrictifs n’acceptent que l’euthanasie passive, c’est-à-dire le fait de ne plus donner de traitement au patient, pour éviter l’acharnement thérapeutique et pour respecter les choix du patient de ne plus vouloir recevoir de traitement. Il s’agit par exemple de la France, du Royaume-Uni ou certains Etats américains tel que le Michigan.

En revanche, il existe de pays qui ont légalisé l’euthanasie active dite directe, soit le fait pour un médecin de donner lui-même un médicament à un patient, comme les Pays-Bas, la Belgique ou l’Oregon, un autre Etat américain. Certaines conditions doivent être respectées du point de vue du médecin. L’aide au suicide n’est toutefois pas un droit du patient et il ne peut donc pas l’invoquer pour avoir droit à des médicaments.

IV. Conclusion

La Suisse a une vision très libérale du suicide assisté, vision qui n’est pas partagée par la plupart des législations des pays du monde. Cependant, les mœurs évoluent et cette pratique est de plus en plus acceptée par les différentes juridictions.

Le Conseil fédéral estime qu’une norme pénale spécifique sur l’assistance au suicide n’est pas nécessaire, bien que certains auteurs de doctrine considèrent qu’un grand nombre de situations nécessiterait une clarification et qu’il faudrait introduire une législation à ce sujet. Les arrêts de jurisprudence sont nombreux et nous verrons si des changements sont apportés à l’avenir.

Le notaire joue un rôle fondamental dans ces situations difficiles, en tant que garant du consentement libre et éclairé de la personne concernée.

Co-écrit par Albertine Necker, Etudiante master en droit

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Le meurtre passionnel

La notion de meurtre passionnel est extrêmement utilisée par les séries policières et autres polars. La situation la plus communément décrite est celle où une personne tue son conjoint sous l’effet de la colère ou de la jalousie, suite à une tromperie ou une information qui la pousse à passer à l’acte.

Nous retrouvons également le meurtre passionnel à l’art. 113 du Code Pénal suisse. Cependant, l’histoire décrite plus haut n’est pas forcément constitutive d’une telle infraction. En effet, la définition donnée par le législateur suisse n’est pas la même que celle donnée dans d’autres pays ou par les auteurs à succès.

Il est ainsi intéressant de relever les divergences de langage entre le système juridique et les compréhensions courantes de certains termes.

I. Définition

Le législateur suisse définit le meurtre passionnel comme un acte homicide (c’est-à-dire que l’auteur a tué la victime) commis par l’auteur alors qu’il était en proie à une émotion violente ou qu’il était au moment de l’acte dans un profond désarroi ; les circonstances devaient rendre cette émotion ou ce désarroi excusable.

II. Éléments constitutifs

Pour que le meurtre passionnel soit retenu, il faut que l’auteur ait tué sa victime. Il s’agit de la première condition fondamentale.

Ensuite, l’auteur doit se trouver en proie d’une émotion violente ou d’un profond désarroi. Ces deux notions sont très différentes. En effet, l’émotion violente doit être comprise comme découlant d’un état psychologique particulier, d’origine émotionnelle et non pathologique, qui se caractérise par le fait que l’auteur est submergé par un sentiment violent qui restreint dans une certaine mesure sa faculté d’analyser correctement la situation ou de l’analyser. Ainsi, au vu des circonstances, il n’a pas pu faire autrement que de commettre l’acte homicide.

Le profond désarroi est un état d’émotion, dont les causes peuvent être multiples, qui mûrit sur une longue période, mettant l’auteur au comble du désespoir. Ce désespoir le pousse également à commettre l’acte et il ne peut pas faire autrement au vu des circonstances.

Les circonstances devaient rendre l’émotion ou le désarroi excusable, c’est-à-dire que l’état psychologique doit être fondé sur des éléments éthiques objectifs. Il faut examiner si une autre personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait réagi de la même manière. Il est important de préciser que l’état est excusable, mais pas l’acte en lui-même.

Les circonstances qui ont déclenché l’émotion ou le désarroi ne doivent pas avoir été causées par l’auteur et ainsi échapper à sa volonté.

Finalement, il faut qu’il y ait un lien entre l’état psychologique particulier excusable et le comportement homicide. Si l’état psychologique particulier n’est pas la cause du comportement homicide, il ne s’agit pas d’un meurtre passionnel (si une épouse tue son mari alors qu’elle est en proie à une émotion violente car sa voisine a mis ses poubelles devant sa porte, elle ne peut pas être coupable d’un meurtre passionnel).

III. Applications en Suisse

Ces notions relèvent du droit fédéral, si bien qu’elles sont communes à tous les cantons. Il n’en demeure pas moins que chaque canton, y compris celui de Fribourg, a ses propres sensibilités quant à la question et son acceptation. Le rôle de l’avocat dans de tels procès sera de démontrer l’état de l’auteur pour justifier le caractère inévitable de son acte.

En Suisse, les juges ont déterminé qu’un homme ayant tué son gendre qui maltraitait sa fille et son petit-fils et qui, au cours de la discussion fatale, l’a accusé d’être le père incestueux de son petit-fils avait été en proie d’une émotion violente excusable. Cependant, n’est pas considéré comme une émotion violente excusable le mari qui tue son épouse car celle-ci se refuse obstinément à lui.

La jurisprudence a considéré que la jalousie ou une forme de frustration car le conjoint est parti ne peut pas constituer une circonstance rendant l’émotion ou le désarroi excusable. L’acte était plutôt poussé par esprit de vengeance ou par égoïsme.

De plus, le Tribunal fédéral a refusé le caractère excusable à celui qui a tué sous le coup d’une colère dont la virulence était due à l’ingestion massive d’alcool.

IV. Conclusion

Comme nous l’avons vu, les situations dans lesquelles Brenda assassine Kevin, car il aurait eu une aventure avec Kelly ne peuvent pas être considérées comme un meurtre passionnel au sens de l’art. 113 CP. En revanche, pourraient être appliqués le meurtre « ordinaire » de l’art. 111 CP ou l’assassinat de l’art. 112 CP (meurtre avec une absence particulière de scrupule).

Il est courant d’entendre des avocats plaider le meurtre passionnel de l’art. 113 CP, car la peine encourue pour cette infraction est plus basse que le meurtre ou l’assassinat. L’auteur peut encourir entre un an et dix ans de prison, selon les circonstances, au lieu de respectivement cinq ou dix ans de prison minimum.

Le 3 juin 2020, la Conseillère aux Etats tessinoise Marina Carrobio Guscetti a déposé une motion pour modifier (ou « corriger », selon ses termes) l’intitulé de l’infraction pour supprimer le terme « passionnel », car elle le trouvait inadéquat. Elle estimait que celui-ci suggérait ou confortait les représentations sociales communes dans lesquelles il était excusable de commettre un meurtre lorsque l’on est éconduit. L’avenir nous dira si cette motion sera acceptée ou non.

Co-écrit par Albertine Necker, Etudiante master en droit

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Le changement de nom des enfants après le divorce

1. Changement de nom

Le nom civil d’une personne ne peut en principe pas être modifié (ATF 136 III 161 consid. 3.1, JdT 2011 II 247). Toutefois, s’il existe de motifs légitimes, le gouvernement du canton de domicile peut autoriser une personne à changer de nom (art. 30 CC). Savoir s’il existe dans un cas particulier des motifs légitimes pour un changement de nom est une question d’appréciation que l’autorité compétente doit trancher selon les règles du droit et de l’équité (ATF 140 III 577 consid. 3.2, JdT 2015 II 319 p. 321 s.).

2. Motifs légitimes

Jusqu’à l’entrée en vigueur de l’art. 30 al. 1 CC dans sa nouvelle teneur et l’introduction de la notion de motifs légitimes en 2013, une personne souhaitant changer de nom devait faire la démonstration que de justes motifs fondaient sa requête, à savoir, outre l’existence de motifs liés au nom lui-même, celle de motifs entraînant des désavantages sociaux concrets et sérieux (ATF 136 III 161 consid. 3.1.1). La jurisprudence était particulièrement restrictive à cet égard, ne tenant compte que des motifs objectifs invoqués (ATF 145 III 49 consid. 3.2).

La modification de l’art. 30 al. 1 CC visait à assurer l’égalité entre époux en matière de nom et de droit de cité. La distinction entre les motifs légitimes de cette disposition et les justes motifs de l’ancienne disposition n’a pas fait l’objet de discussions particulières au Parlement. Les débats parlementaires démontrent néanmoins que la condition des motifs légitimes visait à diminuer les obstacles au changement de nom, sans pour autant ouvrir la possibilité à quiconque de modifier son nom à sa guise. La modification législative et l’assouplissement qu’elle supposait étaient toutefois essentiellement évoqués en lien avec un changement d’état civil ou des enfants issus de familles recomposées plutôt qu’avec une procédure ordinaire de changement de nom (ATF 143 III 49 consid. 3.2).

La seule jurisprudence publiée depuis la modification législative concerne d’ailleurs le changement de nom d’un enfant autorisée à porter le nom du détenteur de l’autorité parentale après le divorce de ses parents (ATF 140 III 577).

Cependant, aucun élément ne permet de restreindre l’assouplissement législatif à un changement d’état civil, voire à un changement de nom réclamé par un enfant en référence à une situation familiale particulière (ATF 145 III 49 consid. 3.2).

La requête doit toujours faire état de motifs particuliers, lesquels ne peuvent être illicites, abusifs ou contraire aux mœurs (ATF 145 III 49 consid. 3.2).

La composante subjective ou émotionnelle de la motivation du requérant ne peut en revanche être écartée comme par la passée, pour autant que les raisons invoquées atteignent une certaine gravité et ne soient pas purement futiles (ATF 145 III 49 consid. 3.2).

3. Dépôt de la requête du changement de nom par l’enfant

Le droit au changement de nom appartient aux droits strictement personnels relatifs, raison pour laquelle les personnes capables de discernement mais privées de l’exercice des droits civils exercent ce droit de manière autonome (ATF 117 II 7 consid. 1b, JdT 1992 I 350). Pour l’enfant qui n’est pas capable de discernement, la jurisprudence susmentionnée admet que la requête en changement de nom peut être formée par le représentant légal. En principe, un enfant de 12 ans doit être considéré comme capable d’agir dans une procédure en changement de nom, conformément à l’art. 30 al. 1 CC (ATF 140 III 577 consid. 3, JdT 2015 II 319 p. 320 s.).

4. Conclusions

Dans tous les cas, il faut examiner les circonstances concrètes du cas particulier. Les motifs invoqués à l’appui de la requête de changement de nom doivent être suffisants.

Il est plus opportun de procéder à une préanalyse avec l’aide d’un avocat avant de déposer la requête, afin que celle-ci soit d’emblée suffisante pour éviter une rejet qu’il sera ensuite très difficile d’écarter.

Co-écrit par Albulan Serifi, avocat-stagiaire auprès de l’Etude Ferraz

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