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Author: Olivier Ferraz

Etude Ferraz > Articles parOlivier Ferraz (Page 3)

Constituer sa société à responsabilité limitée

I. Généralités

La société à responsabilité limitée (ou Sàrl) est une société constituée de deux éléments : des personnes et un capital de minimum CHF 20’000.00. Elle a un caractère mixte, à savoir des particularités de sociétés de personnes, comme la société simple, ainsi que des particularités de sociétés commerciales, comme la société anonyme. En tant que personne morale à part entière, la Sàrl est un sujet fiscal et peut être responsable pénalement ou encore poursuivie par la voie de la faillite. La valeur minimale des parts sociales est de CHF 100.00.

Normalement, comme le précise le nom de la société, la responsabilité des associés est partiellement protégée. Cependant, le juge peut lever cette protection en cas d’abus, notamment lorsque la société est exclusivement dressée comme « écran » entre le client et le prestataire effectif.

La Sàrl peut être constituée de personnes physiques ou morales, ainsi que par des sociétés en nom collectif. En revanche, une société simple, laquelle n’a pas de personnalité juridique (capacité de représenter et d’être représentée en justice), ne peut pas devenir associée d’une Sàrl.

La raison sociale, le siège, l’adresse, le but, le montant du capital, les associés et les gérants sont inscrits au registre du commerce.

II. La constitution

A. Le passage devant le notaire

Pour constituer une société à responsabilité limitée, les futurs associés doivent passer un acte authentique devant notaire, par lequel ils déclarent fonder une Sàrl. Le passage par la case notaire est un passage obligatoire en l’état du droit actuel.

Ne vous y trompez pas, même les plateformes low-cost de constitution de sociétés n’y coupent pas ; elles se contentent simplement d’y faire procéder à très bas prix (env. une centaine de francs) auprès de notaires « libres » de certains cantons alémaniques. Cette façon de procéder est parfaitement légale, même si elle présente des risques certains pour les clients dans la mesure où toute la phase de conseil et de contrôle est reléguée à l’arrière-plan, au profit d’une maximisation des coûts.

Les fondateurs arrêtent le texte des statuts, déterminent le capital et sa répartition, ainsi que les associés et les organes. La manifestation de volonté doit être claire et unanime.

Les statuts doivent obligatoirement contenir la raison sociale, le siège, le but, le montant du capital social (en francs suisses) et la forme à observer pour les communications de la Sàrl. Ils peuvent contenir également d’autres éléments, tels que les droits de vote, les associés gérants etc. Ils doivent être datés. Au moment de l’inscription au registre du commerce, les statuts sont vérifiés par le proposé du registre du commerce.

Pour que la société soit valablement constituée, il faut que les fondateurs aient souscrit les parts sociales (c’est-à-dire aient promis de payer leur part) et libéré l’apport (c’est-dire qu’ils aient effectivement versé l’argent). Les versements interviennent par la consignation du capital auprès d’une banque, sur un compte de consignation ouvert à cet effet, sauf pour les cas particuliers de constitution par apports en espèces, transformations, fusions, compensation de créances, etc., que nous ne traiterons pas ici.

Les fondateurs doivent également constater devant le notaire que toutes les parts sociales ont été valablement souscrites, que les apports correspondent au prix total d’émission, qu’ils ont été effectués conformément aux exigences légales et statutaires et qu’ils acceptent l’obligation d’effectuer des versements supplémentaires ou de fournir des prestations accessoires.

B. L’inscription au registre du commerce

Une fois l’acte constitutif instrumenté, le notaire le déposera au registre du commerce pour en requérir l’inscription, avec ses annexes.

Cette inscription a divers effets, internes et externes. Le plus important est l’acquisition de la personnalité morale. Par cette inscription, la société devient une personne morale et reçoit certains droits, comme la protection de la raison sociale, mais également des obligations, comme le fait de devoir payer des impôts. La personnalité juridique est acquise au moment de l’inscription.

C. Les délais

Les délais de constitution d’une Sàrl varient en fonction des notaires, de quelques jours à plusieurs mois.

Pour notre part, dans le cas des constitutions ordinaires par apports en espèces, nous partons du principe que le seul délai raisonnable en la matière est celui qu’il faut au client pour nous remettre les informations nécessaires. Pour cette raison, nous travaillons de manière optimisée, avec des formulaires détaillés et précis. Cette manière de procéder nous permet en règle générale d’assurer l’établissement d’un projet complet d’acte constitutif avec ses annexes sous 24h à 48h ouvrables dès réception des informations complètes de la part du client. Grâce à l’informatique, rien ne justifie aujourd’hui que tout notaire ne soit pas en mesure d’en faire de même.

A ce délai de traitement notarial s’ajouteront ensuite 10 à 15 jours en moyenne de traitement par le registre du commerce, variable en fonction des cantons et des périodes (surcharges administratives, féries, etc.).

Nos clients peuvent également profiter, où qu’ils se trouvent dans le monde, d’instrumentations entièrement à distance, sans avoir à se déplacer à l’étude. En effet, la constitution d’une société peut parfaitement avoir lieu par représentation.

D. Les coûts

Le coût de constitution d’une Sàrl dans les cantons de notariat dit « latin », varie en fonction des cantons et des notaires, de l’ordre de CHF 1’500.00 à CHF 3’500.00 en moyenne, auxquels viennent encore s’ajouter les frais de registre du commerce d’env. CHF 600.00 à 900.00 suivant les cas.

Sauf cas particulier, de notre point de vue rien ne justifie de s’écarter du minimum légal fixé par la loi dans le canton de Fribourg. Ainsi, pour un exemple concret auprès de notre étude, la constitution d’une Sàrl ordinaire avec capital de CHF 20’000.00 entièrement libéré en espèces avec un seul associé gérant coûtera un peu moins de CHF 2’000.00 ttc (env. CHF 1’250.00 de frais de notaire et env. CHF 700.00 de frais de RC). Ces montants peuvent varier en fonctions des spécificités du cas concret.

La loi fixant à la fois des montants fixes pour certains frais et des fourchettes pour d’autres, les pratiques peuvent toutefois se révéler très variables entre différents notaires. N’hésitez pas à demander plusieurs devis chez différents notaires et dans différents cantons avant de faire votre choix.

E. Guide pratique

Pour faciliter votre passage chez le notaire et ainsi éviter des frais inutiles, pensez à définir précisément :

– le nom de la société ;

– le siège de la société (commune politique) ;

– l’adresse de la société (si c’est une sous-location, il faudra mentionner le c/o et avoir une déclaration d’acceptation du locataire principale qui domicilie la société ;

– noms et prénoms des fondateurs (avec données personnelles et pièces d’identité) ;

– noms et prénoms des associés (avec données personnelles et pièces d’identité) ;

– répartition du capital social entre les associés ;

– but de la société ;

– montant du capital social ;

– division du capital social ;

– modalités de libération du capital social (apports en espèces, apports en nature, compensation de créances, reprises de biens etc.) ;

– modalités particulières (reprises de biens, avantages particuliers, etc.) ;

– détermination des gérants et des pouvoirs de signature, avec nomination du président ;

– renonciation (opting-out) ou élection d’un organe de révision.

N’hésitez pas à nous contacter afin de disposer de nos formulaires types qui faciliterons grandement vos démarches.

III. Conclusions

L’intérêt de la Sàrl réside essentiellement dans son caractère plus personnel que pour la SA. Cette figure juridique est plus spécifique en ce sens qu’elle lie personnellement les associés et la société, avec la possibilité d’aller très loin dans l’aménagement de leurs relations (obligations, interdictions, versement supplémentaires, fidélité, concurrence, etc.).

Il est impératif de bien vous faire conseiller dès le départ car les modifications et les transformations d’une société constituée à la hâte coûtent souvent bien plus cher que de la constituer juste d’emblée. A cela s’ajoutent encore les questions d’opportunité de constituer une société et du type de société à constituer, notamment sous l’angle fiscal.

Les constitutions low-cost de sociétés sont fréquemment un exemple type de mauvaises économies. Même si vous travaillez avec une plateforme de constitution low-cost, pensez à faire vérifier votre constitution par un notaire que vous connaissez, avant que celle-ci ne soit instrumentée. Ça vous coûtera toujours moins cher que de recommencer ou pire, tout modifier après coup. Fréquemment, lorsqu’on additionne aux coûts d’une plateforme low-cost les frais de conseil auprès d’un notaire de confiance ainsi que ceux de la légalisation de signature indispensable à l’inscription auprès du registre du commerce, l’économie réalisée devient dérisoire et sans commune mesure avec le risque de faire une erreur ou de devoir procéder tout de suite après à des modifications qui se chiffrent généralement en plusieurs milliers de francs.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

L’associé de la Sàrl, ses devoirs et son exclusion

Introduction

La Sàrl fut introduite en Suisse en 1936 à l’occasion de la révision du droit des sociétés. À cette occasion, le but du législateur était de créer une « nouvelle forme de société, qui joue un rôle intermédiaire entre l’union de capitaux et le groupement d’individus ».[1]

La Sàrl est par définition, une corporation hybride, à cheval entre la société capitaliste et la société de personnes. Elle poursuit le plus souvent des buts économiques et exploite en principe une entreprise commerciale, dont le capital social est fixé à un montant déterminé. Ses dettes ne sont garanties que par l’actif social.

Néanmoins, sa réglementation étant majoritairement dispositive, elle permet de prendre concrètement en compte la personne des associés.[2] Le régime du sociétariat est « conçu en fonction des besoins des entreprises dont le cercle des associés est limité ou plutôt étroit ».[3]

À travers cet exposé, nous analyserons dans un premier temps le statut juridique de l’associé, concentrant notre attention sur les devoirs de celui-ci. Son exclusion pourra ensuite être examinée.

1. La situation juridique de l’associé

À travers le régime du sociétariat, il est permis d’introduire de façon simple des éléments personnalistes dans une société de capitaux.[4]

En principe, la situation juridique de chaque associé est déterminée en fonction de sa participation au capital (art. 798 al. 3 CO pour les dividendes, art. 806 al. 1 CO concernant le droit de vote, art. 826 al. 1 s’agissant du droit à une part de la liquidation). Au regard de l’art. 813 CO, l’égalité de traitement entre les associés est également requise. Ces deux remarques nous permettent de rejoindre les caractéristiques d’une société capitaliste typique.

Néanmoins, l’associé jouit d’un statut personnel propre lui accordant une place à part au sein de la Sàrl. Ceci se traduit par la publicité du sociétariat. Les associés et mouvements du sociétariat doivent être inscrits au registre des parts sociales (art. 790 CO) et également au registre du commerce (art. 791 CO).[5] En outre, des devoirs de fidélité et de prohibition de concurrence sont expressément prévus dans la loi, de même que l’obligation des associés de participer activement à la représentation et à la gestion de la société (Selbstorganschaft).[6]

La responsabilité de l’associé peut être fondée sur un manquement à des obligations en tant qu’organe (au sens formel ou de fait), ou de manière personnelle, par exemple dans le cadre d’une levée de voile corporatif. Notons que le risque de levée du voile corporatif est élevé dans le régime de la Sàrl, en raison du caractère personnaliste des activités des associés.[7]

2. Devoirs de l’associé

Il existe deux catégories de devoirs incombant aux associés : les devoirs patrimoniaux et les devoirs sociaux. Les obligations patrimoniales sont celles pouvant être exprimées au moyen d’une certaine valeur pécuniaire, tandis que les obligations sociales ne correspondent à aucune valeur pécuniaire déterminée.

Les devoirs patrimoniaux comprennent : le devoir de libération, l’éventuelle obligation d’effectuer des versements supplémentaires et l’éventuelle obligation de fournir des prestations patrimoniales accessoires.

Les devoirs sociaux comprennent : l’obligation de gérer et représenter la société, le devoir de sauvegarder le secret d’affaire, le devoir de fidélité, la prohibition de faire concurrence, et l’éventuelle obligation d’effectuer des prestations statutaires accessoires de nature sociale. Nous détaillerons plus largement les devoirs sociaux.

2.1 Devoir de libération

En vertu de l’art. 777c CO, l’associé d’une Sàrl est tenu d’apporter la part de capital qu’il a souscrit. En principe la libération se fait en espèce mais une libération en nature peut également intervenir.[8]

2.2 Gestion et représentation

Aux termes de l’art. 809 CO, les associés exercent collectivement la gestion de la société, sauf si les statuts en disposent autrement. Ils doivent faire preuve de bonne foi et agir dans l’intérêt de celle-ci. Le devoir de diligence guidant cette tâche est réglé à l’art. 812 al. 1 CO selon lequel, « les gérants ainsi que les tiers chargés de la gestion exercent leurs attributions avec toute la diligence nécessaire et veillent fidèlement aux intérêts de la société ».

Le devoir de diligence oblige ainsi les gérants à « agir et à apporter aux affaires le soin et les efforts nécessaires ».[9] L’évaluation est faite de manière objective, c’est-à-dire du point de vue d’un sujet moyen ne disposant pas de connaissances particulières dans le domaine.[10]

2.3 Devoir général de loyauté

Le devoir de loyauté est explicité à l’art. 803 CO. Il se compose de trois volets : la sauvegarde du secret des affaires, le devoir de fidélité et la prohibition de faire concurrence.

Au sujet du champ d’application temporel, l’art. 803 CO s’applique pendant toute la durée de la détention de la part sociale, ainsi que pendant la liquidation en cas de dissolution. En revanche, sa teneur ne s’applique pas aux périodes précédant l’acquisition de la part sociale.[11]

2.3.1 La sauvegarde du secret des affaires

L’art. 803 al. 1 CO ne définit pas la notion de secret des affaires. Dans l’ATF 82 II 216, le Tribunal Fédéral a qualifié le secret d’affaires comme « tous les faits de la vie économique que l’intérêt légitime de la société commande de ne pas divulguer ».

Ainsi, le secret des affaires se compose des caractéristiques suivantes :

– Cela consiste en « une information ou une combinaison de plusieurs informations de n’importe quel type, pouvant être positive (un fait a lieu) ou négative (un fait n’a pas lieu) »[12] ;

– Au regard du critère de l’intérêt, cette information a une certaine valeur ;

– Elle est de manière générale méconnue ;

– Elle n’est pas aisément accessible à des fins de vérification ;

– Selon le critère de la volonté de confidentialité, le maître du secret a pris, prend ou prendra vraisemblablement des mesures pour que l’information reste secrète.[13]

Notons encore que ce devoir ne traduit qu’une interdiction de divulgation, l’associé pourrait très bien utiliser le secret de manière personnelle.[14]

2.3.2 Devoir de fidélité

Le devoir de fidélité ne s’applique pas qu’à chaque associé pris individuellement, il se concrétise également à l’égard des associés en assemblée des associés .

A cet égard, le principe de bonne foi s’applique. Selon l’ATF 102 II 165, les règles de la bonne foi limitent l’exercice des droits des associés, même si leur décision respecte théoriquement la loi et les principes reconnus en droit des sociétés. En effet selon notre Haute Cour, « l’art. 2 CC introduit dans l’application du droit la référence à des valeurs générales, comme les bonnes mœurs, l’équité et les droits de la personnalité »[15].

Selon son deuxième alinéa, l’art. 803 charge les associés, sous réserve de clause statutaire dérogatoire, de « s’abstenir de tout ce qui porte préjudice aux intérêts de la société ».

Une telle interdiction existe pour les associés gérants même en l’absence d’obligation expresse dans les statuts, en vertu de l’art. 812 CO. En particulier, ils « ne peuvent gérer des affaires qui leur procureraient un avantage particulier et qui seraient préjudiciables au but de la société ».[16] La notion de but fait référence au but de la Sàrl inscrit au registre du commerce. Toutefois, si les activités poursuivies effectivement par la société diffèrent du but inscrit au registre du commerce, le but effectif sera déterminant.[17] Il y a notamment violation des règles de bonne foi en cas d’utilisation « d’une institution juridique pour une fin qui lui est étrangère ».[18]

L’art. 803 al. 2 étant de nature dispositive, une dérogation est possible. Le système légal peut être complété, remplacé ou exclu par les statuts ou plus tard lors d’une décision des associés à majorité qualifiée.[19] Au regard de l’al. 3, un associé pourra exercer des activités qui violent le devoir de fidélité, pour autant qu’il reçoive l’accord écrit de tous les autres associés. Les statuts peuvent prévoir à la place que l’approbation de l’assemblée des associés en tant qu’organe est nécessaire. Le but de cette disposition n’est pas d’inciter un associé à enfreindre le devoir de fidélité, mais d’autoriser des activités précises, au cas par cas.[20]

2.3.3 Prohibition de faire concurrence

L’art. 803 al. 2 3e phrase vise la mise en place statutaire de la prohibition de faire concurrence. Celle-ci s’inscrit dans le devoir de fidélité, cependant elle est plus contraignante et « peut priver l’associé de sa liberté économique plus que ne le requiert les intérêts légitimes de la société »[21].

Il est tout à fait envisageable pour une personne d’être associée d’une Sàrl et, parallèlement, de faire directement ou indirectement concurrence à la société par l’exercice d’une activité commerciale annexe.

S’agissant des associés non gérants, la prohibition de faire concurrence doit être expressément prévue pour acquérir validité, au moyen d’une clause statutaire de prohibition de faire concurrence. Les art. 340ss CO règlent son contenu par analogie concernant la Sàrl. Notons les solutions en matière de droit du travail qui demeurent in casu applicables par analogie.[22]

S’agissant des associés gérants, cette interdiction est réglée à l’art. 812 al. 3 CO et constitue la règle dans ce cas, à moins de l’avoir levée statutairement ou par décision (mécanisme donc inverse de ce qui prévaut pour l’associé non gérant). Cette distinction entre le statut d’associé gérant et non gérant fut introduite par le nouveau droit de la Sàrl.

L’ancien art. 818 CO définissait la prohibition de faire concurrence mais celle-ci fut abrogée dans le nouveau droit. Désormais, seule la jurisprudence aiguille quant aux termes de concurrence. Ainsi, les ATF 71 II 272 et 81 II 520 ont précisé que « la prohibition de faire concurrence touche l’ensemble des activités statutaires ou effectives de la société, que les contrevenants agissent directement ou indirectement. La possibilité de préjudice suffit. La prohibition subsiste également durant la liquidation dans la mesure des intérêts réels au maintien de la clause »[23].

2.4 Éventuelles obligations de fournir des prestations accessoires

D’éventuelles obligations de fournir des prestations accessoires peuvent être imposées aux associés en vertu des statuts. Celles-ci peuvent être tant patrimoniales que sociales, la loi les limitant aux obligations « qui servent le but de la société ou qui visent à assurer le maintien de son indépendance ou le maintien de la composition du cercle d’associés »[24].

La réglementation expresse de la notion de prestation accessoire rejoint parfaitement le côté personnaliste de la Sàrl.[25]

2.5 Éventuelles obligations d’effectuer des versements supplémentaires

L’art. 795 CO mentionne expressément la possibilité d’introduire une obligation de versements supplémentaires, dont les conditions seront déterminées dans les statuts.[26] Existant à l’égard de la société, elle ne doit pas être confondue avec la responsabilité personnelle des associés vis-à-vis des créanciers.[27]

3. Perte du sociétariat : le cas de l’exclusion

L’exclusion d’un associé pour des motifs personnels est contraire au système de la société de capitaux. Néanmoins, la Sàrl le prévoit pour justes motifs lorsque la présence dudit associé est devenue intolérable.

Dès lors, l’exclusion pour justes motifs a pour but de « protéger la société contre un associé dont le sociétariat ne peut plus lui être raisonnablement imposé »[28].

L’art. 823 CO étant de nature impérative, il met en exergue deux formes d’exclusions ; d’une part l’exclusion requise auprès du juge, d’autre part l’exclusion prévue dans les statuts.

3.1 Exclusion statutaire

Les art. 776a al. 1 ch. 18 et 823 al. 2 CO permettent à l’assemblée d’associés de prévoir un droit d’exclusion d’un associé pour des motifs déterminés, énoncé en tant que « clause spéciale d’exclusion »[29]. Les motifs d’exclusion sont à déterminer à l’avance dans les statuts, ce qui diffère du système d’exclusion pour justes motifs figurant au premier alinéa de l’art. 823 CO. En effet, « les dispositions statutaires doivent être clairement définies, et leur interprétation doit être restrictive ».[30] Une clause générale ou le recours à la notion de justes motifs n’est pas permise.[31] En revanche, les associés restent relativement libres dans la formulation de la clause ainsi que dans la détermination des circonstances d’exclusion, sous réserve de la bonne foi (art. 2 CC).[32]

L’adoption de la clause d’exclusion nécessite l’approbation de tous les associés. Une fois celle-ci adoptée, la décision d’exclure l’associé doit être prise à double majorité. L’art. 808b al. 1 ch. 9 CO requiert « au moins deux tiers des voix représentées et la majorité absolue du capital social pour lequel le droit de vote peut être exercé ».

3.2 Exclusion judiciaire

Selon l’art. 823 al. 1 CO, « la société peut requérir du juge l’exclusion d’un associé pour de justes motifs ». La requête doit émaner de la société et non des associés, c’est un droit collectif.

La décision de l’assemblée des associés est également soumise à double majorité, en vertu de l’art. 808b al. 1 ch. 8 CO. Il s’agit d’une compétence intransmissible des associés. Le second alinéa autorise cependant l’assemblée à prévoir une plus forte majorité dans les statuts, mais non une plus légère. Le procès-verbal de celle-ci doit mentionner les justes motifs sur lesquels est fondée la décision d’exclusion, le juge ne pourra prendre en compte d’autres motifs dans son analyse.[33]

L’associé dont l’exclusion est portée à l’ordre du jour a le droit d’être entendu, il participe à l’assemblée des associés avec droit de vote. Dès lors, ce droit empêche la requête au juge (et de ce fait l’exclusion) d’un associé détenant plus d’un tiers des droits de vote ou la majorité absolue du capital. La possibilité d’une action en dissolution de la Sàrl subsisterait dans ce cas, si les conditions en sont remplies.[34]

L’exclusion d’un associé au moyen d’une requête judiciaire est une mesure subsidiaire, elle doit rester l’ultima ratio. Si la société dispose d’autres moyens plus raisonnables pour protéger ses intérêts, l’action en exclusion sera rejetée par le juge. Le principe de proportionnalité est un principe cardinal dans la prise de décision de celui-ci.[35] Dans un premier temps, la révocation des pouvoirs de gestion ou de représentation de l’associé seraient préférables[36].

4. Notion de justes motifs

En instituant cette notion juridique indéterminée, le législateur a sciemment voulu donner un certain pouvoir d’appréciation au juge. La jurisprudence ainsi que la doctrine nous guident quant à l’interprétation de cette notion.

Il existe de justes motifs d’exclusion, lorsque « au regard de l’ensemble des circonstances, la continuation du sociétariat ne peut plus être raisonnablement imposé à la société, soit qu’elle rende la poursuite du but social impossible ou nettement plus difficile, soit que l’associé viole ses obligations de manière grave et persistante »[37]. C’est une responsabilité objective, une faute de l’associé n’est pas exigée.

Autrement dit, la situation doit être objectivement propre à rompre la confiance entre les associés et/ou à briser l’animus societatis entre ceux-ci. Selon MONTAVON, tel est par exemple le cas lors « de comportements intolérables, de concurrence, de refus de gérer et représenter la société, d’inexécution de versements supplémentaires et prestations accessoires »[38].

Les motifs sont à apprécier du point de vue de la société. Ils doivent être objectifs et non subjectifs, ainsi une mauvaise entente ou une politique commerciale divergente ne suffisent pas à constituer des justes motifs.[39] Peuvent être objectivement graves dans le cas d’espèce, par exemple des faits relevant du droit pénal (poursuite pénale d’un associé)[40].

Le CRR CO II évoque quelques motifs d’exclusion admis, notamment :

– « La perte de l’associé d’une qualité nécessaire (une certaine nationalité, une patente, l’appartenance à un groupe) ;

– La violation grave et persistante d’obligations (c.f. sauvegarde du secret d’affaires, devoir de fidélité, prohibition de faire concurrence statutaire, versements supplémentaires, prestations accessoires) ;

– L’indication de fausses informations en relation avec l’acquisition de parts sociales ;

– L’exercice manifestement abusif d’une minorité de blocage ». [41]

Selon le Tribunal Fédéral, il existe en outre de justes motifs « si un associé fait obstruction systématiquement aux décisions de la majorité ou engage et poursuit avec obstination des procès abusifs contre la société ou ses organes »[42]. Notre Haute Cour ajoute, « il n’est pas nécessaire qu’un tel comportement mette en péril l’existence de la société, mais il suffit qu’il empêche toute collaboration utile et satisfaisante », mettant avant tout l’accent sur la rupture du lien de confiance entre l’associé et la société.

5. Effets de l’exclusion

L’exclusion pour justes motifs a des effets ex nunc au jour de l’entrée en force de la décision judiciaire. Envers les tiers, elle ne produira ses effets qu’à partir de la radiation de l’associé du registre du commerce.

Aux termes de l’art. 825 al. 1 CO, l’associé exclu aura droit à « une indemnisation correspondant à la valeur réelle de ses parts sociales ». L’art.825a CO en fixe les modalités.

Les parts sociales de l’associé exclu doivent d’abord être évaluées à leur valeur réelle, selon les critères applicables à l’art. 685b CO. De surcroît, il est possible de prévoir une peine conventionnelle ainsi que des modalités d’évaluation des parts dans les statuts.[43]

Le Tribunal fédéral rappelle à ce sujet, que « l’obligation de désintéresser l’associé exclu n’est pas une condition de l’exclusion. Le juge peut très bien prononcer l’exclusion sans en régler simultanément les effets »[44].

Au regard de l’art. 825a al. 1 CO, l’indemnisation est exigible dès le départ de l’associé, pour autant que la société :

– dispose de fonds propres disponibles ;

– peut aliéner les parts sociales de l’associé qui quitte la société ;

– peut réduire son capital social dans le respect des dispositions en la matière (c’est-à-dire en maintenant un capital social de Fr. 20’000 au moins).

Dans un but de protection de l’associé sortant, c’est à un expert réviseur que revient la tâche de constater le montant de fonds propres disponibles. Cette créance est exigible tant que la société dispose desdits fonds. Si tel n’était pas le cas, l’al. 2 dispose que l’associé exclu « prend en outre position sur le montant possible de la réduction de capital ».

Selon l’al. 3 de la disposition précitée, « l’associé qui a quitté la société dispose d’une créance de rang inférieur, qui ne porte pas d’intérêts, sur le montant pour lequel il n’a pas encore été indemnisé ». C’est une créance postposée, dont le remboursement l’emporte sur les dividendes et les tantièmes.[45]

6. Conclusion

Constituée sous sa forme la plus épurée, la Sàrl présente des caractéristiques proches de la SA. Le législateur l’a souhaité ainsi lors de sa création. Les distinctions fondamentales entre ces deux formes de sociétés sont au nombre de deux : d’une part, la possibilité de devoir fournir des prestations additionnelles, d’autre part le caractère singulier du statut d’associé.

La motivation prépondérante au choix de cette forme juridique sera la volonté des fondateurs de créer une société de capitaux mais aussi caractérisée d’obligations personnelles. L’intérêt est d’instituer une relation intrinsèque de confiance entre la société et ses associés.

Toute médaille ayant son revers, la responsabilité personnelle des associés peut être mise en avant. Ceux-ci risquent de se voir exclus de la société pour « justes motifs », notion sujette à appréciation de cas en cas. À ce sujet, la doctrine et le Tribunal Fédéral s’accordent à dire que le motif d’exclusion doit représenter une grave entrave à la relation de sociétariat. Or, là encore il s’agit d’abord d’être capable de délimiter la notion de gravité. L’associé exclu bénéficie néanmoins d’une indemnité de sortie, le confortant quelque peu.

Pour conclure, la Sàrl satisfait les besoins de qui cherche effectivement la simplicité, tout en permettant la mise en place d’une structure plus complexe si nécessaire. Les statuts permettent l’agencement d’une formule adaptée aux besoins spéciaux des intéressés. C’est là que réside la raison d’être de la Sàrl.

Co-écrit par Pauline Zoller (Juriste auprès de l’Etude Ferraz, étudiante en 3ème année de droit)

Références

[1] Message de 1928, p. 303

[2] Message de 2001, p. 2955

[3] Ibidem

[4] MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, Droit suisse des sociétés, Berne, 2015, N65, p. 721

[5] MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, N105, p. 731

[6] Art. 803 CO; art. 809 CO

[7] MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, N59, p. 719

[8] MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, N69, p. 722

[9] CCR CO II, 2e éd., N4 et 5, p. 1795

[10] ATF 139 III 24

[11] CCR CO II, N13, p. 1722

[12] CCR CO II, N10, p. 1721

[13] Ibidem

[14] Ibidem

[15] ATF 102 II 165

[16] Art. 803 al. 2, 2e phrase

[17] CCR CO II, N21, p. 1723

[18] ATF 86 II 417 ; ATF 94 I 659 ; ATF 105 III 80 ; ATF 115 III 18

[19] CCR CO II, N16, p. 1722

[20] FF 2002, p. 3002

[21] MONTAVON, Droit suisse de la Sarl, Lausanne, 2008, p. 251

[22] MONTAVON, p. 252

[23] ATF II 272 ; MONTAVON, p. 251

[24] Art. 796 al. 2 CO

[25] MEIER-HAYOZ/FORSTMOSER, N72, p. 723

[26] Ibid, N73

[27] Ibid, N75, p. 724

[28] CCR CO II, N1, p. 1838

[29] Art. 776a al. 1 ch. 18 CO

[30] MONTAVON, p. 279

[31] Message 2001, p. 3019

[32] CCR CO II, N17, p. 1840

[33] CCR CO II, N10, p. 1839

[34] CCR CO II, N9, p. 1839

[35] CCR CO II, N4 p. 1838

[36] ATF 89 II 133

[37] CCR CO II, N3 p. 1838

[38] MONTAVON, p. 278

[39] ATF 89 II 133

[40] MONTAVON, p. 278

[41] CCR CO II, N5 p. 1838

[42] ATF 89 II 133

[43] MONTAVON, p. 280

[44] ATF 89 II 133

[45] MONTAVON, p. 280 ;

La responsabilité des actionnaires pour les actes conclus avant la création de la société anonyme

I. Généralités

La société anonyme (SA) est réglée par le Code des obligations suisse (art. 620 ss CO). Elle forme une personne morale, dont le capital-actions de minimum CHF 100’000.- est déterminé à l’avance, divisé en actions et dont les dettes ne sont garanties que par l’actif social. Cela signifie que contrairement à la société simple notamment, on ne peut pas aller rechercher les actionnaires pour les actes conclus au nom de la société, sauf exceptions.

Cependant, avant que la société ne soit créée, il peut arriver que les actionnaires, alors regroupés en une société simple dans le but de fonder la société anonyme, concluent des actes au nom de la future société. Il faut alors déterminer qui est responsable de ces actes et ce qui se passerait si la société ne reconnaissait pas sa propre responsabilité.

II. Actes faits avant l’inscription

La société est créée par un acte authentique (devant le notaire) par lequel les fondateurs déclarent fonder une société anonyme, proposent le texte des statuts et désignent les organes. Ensuite, les actions sont souscrites (les futurs actionnaires disent combien d’actions et à quel prix ils les achètent) et les souscripteurs versent l’argent (20% minimum mais au moins CHF 50’000.00). La société anonyme est inscrite au registre du commerce. Elle n’acquiert la personnalité morale que lors de l’inscription.

La société n’est considérée créée qu’au moment de l’inscription au registre du commerce. Tous les actes conclus avant cette inscription, comme les divers contrats avec des tiers, des assurances, des banques, etc., ne sont pas encore considérés comme conclus au nom de la société anonyme, mais au nom de la société simple formée par les futurs fondateurs.

Au sens de l’art. 654 CO, pour que la société soit seule engagée, il faut que les auteurs des actes conclus mettent dans les contrats ou dans les actes signés de leur main qu’ils sont faits au nom de la société. On utilise communément la notion de fait par ou pour la société « en formation ». Il faut également que les actes soient assumés par la SA dans les trois mois à dater de son inscription.

Si les conditions ne sont pas remplies, les règles générales de reprise de dettes du CO s’appliquent : si l’actionnaire est débiteur de l’obligation « au nom de la société », celle-ci peut reprendre la dette au nom du débiteur, avec l’accord du créancier. Si l’actionnaire est créancier de l’obligation, la société peut reprendre la dette sur la base d’un contrat avec ce premier.

III. Responsabilité des actionnaires en cas de non-reconnaissance

Si la société n’assume pas les obligations contractées, les actes faits avant l’inscription entraînent la responsabilité personnelle et solidaire de leurs auteurs, comme s’ils étaient encore dans une relation de société. Ils ont alors une responsabilité illimitée : en cas de problèmes, ils devront répondre personnellement sur leurs biens des dettes contractées. Ainsi, si les actionnaires ont conclu « pour la société » un contrat avec un vendeur pour CHF 10’000.-, mais que celui-ci n’est pas repris par la société effectivement inscrite, le vendeur pourra aller rechercher personnellement les personnes physiques qui ont conclu le contrat. Elle devront ainsi payer de leur propre poche les montants en jeu.

IV. Conclusions

Avant de conclure un contrat au nom de la société anonyme que vous êtes en train de fonder, assurez-vous bien que les membres du futur conseil d’administration seront enclins à reprendre la dette ou l’engagement au nom de la société. Il est également important que vous notiez de manière claire que l’acte est conclu au nom de la future société et non pas en votre propre nom. Même si cela peut paraître théorique, un différend peut toujours survenir entre les actionnaires même pendant la phase de constitution d’une société.

La meilleure chose à faire est de conclure tous les contrats (bail, crédit, mobilier, véhicule, etc.), s’il doivent vraiment être conclus avant l’inscription de la société au RC, en les signant sous le nom de la société complété par « en formation » et de faire signer ces contrats par tous les futurs actionnaires de la société. De cette manière, le risque est réparti de manière égale et ça évite les mauvaises surprises.

Un accompagnement de qualité par un professionnel qualifié reste un gage de sécurité, y compris s’agissant de ces engagements préalables. Si vous avez des questions n’hésitez pas à nous contacter.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

La prolongation du contrat de bail (art. 272 ss CO)

I. Généralités

Recevoir une lettre de résiliation de son contrat de bail n’est souvent pas une bonne nouvelle, peu importe à qui elle est adressée. Le locataire comme le bailleur peuvent être ennuyés par une telle nouvelle, qui nécessite alors soit de rechercher un nouveau logement ou local commercial, soit de rechercher un nouveau locataire. Suivant les cas, il peut se justifier de demander à l’autorité compétente la prolongation du contrat de bail.

La prolongation du contrat de bail par le locataire est réglée aux art. 272 ss CO. Une telle prolongation n’est pas prévue dans la loi pour le bailleur.

II. La prolongation par le locataire

A. Droit du locataire

Le locataire peut demander la prolongation du contrat de bail de durée déterminée ou indéterminée lorsque la fin du contrat aurait pour lui ou sa famille des conséquences pénibles que les intérêts du bailleur ne justifient pas.

Pour déterminer quels intérêts priment, l’autorité peut se fonder notamment sur (1) les circonstances de la conclusion du contrat et le contenu de celui-ci, (2) la durée du bail (un locataire vivant depuis plus de vingt ans dans un appartement aura plus de chance de se voir accorder une prolongation sur cette base qu’un locataire y habitant depuis seulement quelques mois), (3) la situation personnelle, familiale et financière des parties, ainsi que leur comportement, (4) le besoin qu’a le bailleur ou ses proches d’utiliser les locaux et l’urgence de ce besoin (si le bailleur comptait sur cette résiliation pour y loger son enfant par exemple), (5) la situation sur le marché local du logement et des locaux commerciaux (c’est-à-dire s’il pourra être difficile pour le locataire de trouver un nouvel appartement par la suite).

L’autorité compétente doit en plus vérifier si le locataire a entrepris toutes les démarches qui pouvaient être raisonnablement exigées de lui afin de remédier aux conséquences pénibles du congé.

B. Exclusion de prolongation

Le contrat de bail ne peut pas être prolongé lorsque le congé est donné en cas de demeure du locataire (en cas de retards de paiement), pour violation grave par le locataire de son devoir de diligence ou pour de graves manques d’égards envers les voisins, en cas de faillite du locataire, si, en prévision d’une transformation ou d’une démolition, le contrat de bail a expressément été conclu pour une période expirant au début des travaux ou à la réception de l’autorisation requise.

De plus, aucune prolongation ne peut être accordée lorsque le bailleur offre au locataire des locaux équivalents (c’est-à-dire avec le même loyer, la même surface, etc.).

C. Modalités

La prolongation peut durer au maximum quatre ans pour les baux d’habitations et au maximum six ans pour les baux commerciaux. Dans ces limites, une ou deux prolongations peuvent être accordées. Le juge détermine avec équité s’il y a lieu de prolonger et pour quelle durée. Cependant, si les parties conviennent entre elles d’une prolongation contractuelle du bail, elles ne sont pas liées par les maximums légaux.

L’une des parties (le bailleur ou le locataire) peut demander à ce que la prolongation soit inscrite dans le contrat de bail, si nécessaire.

D. Procédure

La partie qui veut contester le congé doit saisir l’autorité de conciliation dans les 30 jours qui suivent la réception du congé.

Le locataire qui veut demander une prolongation du bail doit saisir l’autorité de conciliation, lorsqu’il s’agit d’un bail de durée indéterminée, dans les 30 jours qui suivent la réception du congé, et lorsqu’il s’agit d’un bail de durée déterminée, au plus tard 60 jours avant l’expiration du mandat.

Pour une deuxième prolongation, le locataire doit saisir l’autorité de conciliation au plus tard 60 jours avant l’expiration de la première prolongation.

Remarque : A défaut d’un jugement ou d’un accord contraires, le locataire peut résilier le bail pendant la prolongation, à différentes conditions, soit en observant un délai de congé d’un mois pour la fin d’un mois lorsque la prolongation ne dépasse pas une année, soit en observant un délai de congé de trois mois pour un terme légal lorsque la prolongation dépasse une année.

III. La prolongation par le bailleur

Il n’existe pas de prolongation légale pour le bailleur. La seule solution qui permet à celui-ci de « prolonger » le contrat après la résiliation est de faire annuler la résiliation. Le congé est annulable si celui-ci contrevient aux règles de la bonne foi. C’est au destinataire du congé, c’est-à-dire dans ce cas le bailleur, de démontrer que le congé est contraire aux règles de la bonne foi.

IV. Conclusion

L’action pour prolongation du contrat de bail peut avoir des conséquences très importantes, notamment en matière de baux commerciaux. Le droit du bail étant extrêmement formaliste tant pour le bailleur que pour le locataire, il est important d’être bien conseillé sur les règles de procédure avant d’agir. Il n’est en règle générale pas possible de rattraper une erreur dans ce domaine, ce qui scelle souvent le sort de ces affaires.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

La résiliation anticipée du contrat de bail (art. 264 CO)

Je suis locataire d’un appartement et souhaiterais partir avant la fin déterminée du bail. Est-ce possible ? Quelles sont les conditions à remplir pour qu’une telle démarche soit acceptable ?

I. Généralités

Lors de la location d’un appartement ou tout autre objet de bail d’habitation ou de bail commercial, le locataire peut restituer le bien de manière anticipée, à certaines conditions. Cette disposition est semi-impérative, c’est-à-dire que les parties ne peuvent pas convenir d’une manière de régler la situation qui soit moins favorable au locataire. De même, le contrat de bail ne peut pas prévoir d’indemnités supplémentaires en cas de résiliation anticipée du contrat de bail.

II. Conditions

Pour pouvoir résilier de manière anticipée le contrat de bail, c’est-à-dire sans respecter les délais légaux ou le terme de congé, le locataire doit respecter certaines conditions. Tout d’abord, il doit présenter au bailleur un nouveau locataire qui soit solvable. Ce dernier doit pouvoir payer régulièrement le loyer et les frais accessoires liés au bail. Pour ce faire, il faut regarder la situation économique du candidat proposé, en prenant en compte son revenu et les ressources de la personne avec qui celui-ci fait ménage commun cas échéant. Il ne faut pas non plus qu’il soit sujet à des poursuites.

De plus, le bailleur ne doit pas pouvoir raisonnablement refuser le nouveau locataire. Cela signifie qu’il doit être objectivement acceptable. La situation se détermine de cas en cas, en fonction notamment de la destination du bien ou selon la personnalité du candidat. Le refus doit se baser sur de justes motifs.

Enfin, le nouveau locataire doit être d’accord de reprendre le bail aux mêmes conditions concernant le loyer, la durée du bail, la destination des locaux et les clauses particulières.

III. Acceptation ou refus du candidat, absence de candidat acceptable

Si le bailleur accepte le candidat, celui-ci reprend le bail (transfert de bail). Les conditions contractuelles ne peuvent pas être changées, sauf si un nouveau contrat est conclu.

Il n’existe pas d’obligation pour le bailleur d’accepter le nouveau locataire et le transfert de bail. Il doit simplement motiver sa décision. En revanche, si les conditions énoncées précédemment sont remplies, l’ancien locataire est libéré de ses différentes obligations (comme le fait de payer le loyer ou trouver un nouveau candidat) dès qu’il propose un nouveau locataire compatible, que celui-ci soit accepté ou non. Si le bailleur ne répond pas, ne motive pas sa décision ou propose au candidat d’autres locaux, ceci est assimilé à un refus du nouveau locataire.

S’il n’y a pas de candidat acceptable, le locataire doit s’acquitter du loyer jusqu’à la fin du contrat de bail ou à l’échéance du délai légal ou contractuel. Cependant, il faut déduire de la facture les impenses qui ont pu être évitées (frais de chauffage, d’électricité…) et des profits tirés de l’usage du bien ainsi que ceux auxquels il a intentionnellement renoncé.

IV. Et pour la résiliation anticipée du bailleur ?

Le bailleur ne peut pas résilier le contrat de manière anticipée. Il doit suivre les conditions légales ou contractuelles, comme les délais ou l’utilisation de la formule agrée par le canton. Si la résiliation entraîne des inconvénients importants pour le locataire, celui-ci peut demander une prolongation du contrat.

V. Conclusion

Le droit des contrats suisse est basé sur le principe de la protection de la partie faible. Ceci entraîne ainsi certains avantages pour le locataire et quelques obligations supplémentaires pour le bailleur.

Il est important pour le locataire, comme pour le bailleur de connaître ses droits et obligations pour éviter des problèmes lors de l’application de ceux-ci. Le droit du bail est un droit extrêmement formaliste, qui ne tolère ni approximations, ni erreurs. Certains diraient même qu’une croix dans la mauvaise case peut sceller le sort d’un procès et nous aurions tendance à leur donner raison. Partant, pensez à vous faire conseiller avant d’agir.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

La liquidation officielle

I. Généralités

La liquidation officielle est une manière pour les héritiers d’acquérir leur part de la succession. Elle peut être choisie directement par les héritiers au moment de l’ouverture de la succession, ou après le bénéfice d’inventaire. Pour d’autres informations sur les différentes solutions qui s’offrent à vous lors de la succession, n’hésitez pas à aller lire nos différents articles.

La liquidation officielle permet aux héritiers de recevoir leur part de la succession, tout en n’engageant pas de responsabilité personnelle. Ce mode d’acquisition de la succession peut être utile si les héritiers ne savent pas si le testateur a beaucoup de dettes ou non ou lorsque la succession peut s’avérer compliquée. La liquidation de la succession se fait alors par l’autorité cantonale officielle.

La liquidation officielle est différente de l’acceptation sous bénéfice d’inventaire, car les héritiers ne répondent jamais personnellement de ce qu’ils ont reçu, même s’il y a plus de dettes que de biens.

II. Caractéristiques

La liquidation officielle permet de supprimer la responsabilité personnelle illimitée de l’héritier. Donc, l’héritier n’a plus à répondre des dettes du testateur sur ses propres biens. De plus, les héritiers demeurent les successeurs universels du défunt, mais pendant la procédure, les droits de gestion et de disposition sont suspendus. La liquidation est alors opérée par l’autorité compétente ou la personne désignée par elle. Les héritiers ont toutefois le droit de conseiller et de recourir contre les décisions du liquidateur officiel et ils peuvent ouvrir une action successorale pour protéger leurs droits.

III. Cas

La liquidation officielle peut être requise par un héritier. Pour ce faire, différentes conditions doivent être remplies : le droit de répudier ne doit pas être déchu (cas où l’héritier dépasse ses pouvoirs de gestion), la demande doit être formulée dans un délai de trois mois et aucun autre héritier ne doit avoir accepté la succession (en effet, dès le moment où un héritier accepte la succession ou l’accepte sous bénéfice d’inventaire, la liquidation officielle n’est plus possible).

La liquidation officielle peut également être demandée par un créancier, individuellement. Seuls les créanciers du défunt peuvent la demander, mais pas les créanciers de la succession (frais d’obsèques…), ni les créanciers des héritiers.

Le créancier doit rendre vraisemblable qu’il a un intérêt, c’est-à-dire des raisons de craindre qu’il ne sera pas remboursé. Il doit établir qu’il a demandé remboursement à tous les héritiers connus et que ceux-ci ne s’exécutent pas. Si les héritiers contestent la créance, la procédure sera suspendue jusqu’à ce que celle-ci soit ou non confirmée.

IV. Conclusion

La liquidation officielle est un excellent moyen pour les héritiers de faire un partage des biens du défunt sans avoir à s’en occuper personnellement. Comme la responsabilité des héritiers est limitée, cette forme de liquidation permet de protéger le patrimoine de ces derniers en cas de dettes trop importantes.

La liquidation officielle étant peu connue du public, nous vous conseillons tout de même de vous renseigner avant de prendre votre décision. En effet, si l’apparente simplicité de celle-ci peut donner un sentiment de sécurité et d’efficacité, il n’en demeure pas moins qu’elle revient à renoncer à toute gestion de la succession, ce qui pour des raisons personnelles ou émotionnelles peut s’avérer parfois difficile. Une analyse préalable par un conseiller expérimenté n’est jamais un luxe avant de remettre ses droits entre les mains de l’état.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

Le bénéfice d’inventaire

Mon grand-oncle est décédé et je fais partie de ses héritiers. Cependant, je n’étais pas très au courant de l’état de ses finances. Y a-t-il une manière pour moi, avant d’accepter la succession, de connaître l’état de ses dettes et de ses biens ? Si oui, comment puis-je le faire et dans quels délais ? Quels sont les devoirs qu’il m’incombe de respecter ?

I. Généralités

Au moment de l’ouverture de la succession, les nouveaux héritiers peuvent ne pas savoir quelles sont les dettes du défunt et quels risques ils prennent en acceptant la succession. De ce fait, au lieu de répudier complètement la succession (à ce sujet, vous pouvez vous référer à notre article sur la répudiation), les héritiers peuvent demander un bénéfice d’inventaire. Il s’agit d’un droit propre, indépendant de l’attitude des autres héritiers.

Le bénéfice d’inventaire peut être très intéressant si on ne veut pas répudier la succession, sans pour autant opter pour une liquidation officielle. Dans ce cas, le bénéfice d’inventaire permet aux héritiers d’obtenir une vue claire de l’état de la succession et lui donne les moyens de prendre une décision en parfaite connaissance de la situation.

Pour pouvoir demander le bénéfice d’inventaire, il faut donc être héritier de la succession et ne pas avoir répudié.

Au terme de l’inventaire, chaque héritier peut : (1) accepter purement et simplement la succession, (2) répudier la succession, (3) accepter sous bénéfice d’inventaire ou (4) demander la liquidation officielle. Cette dernière possibilité n’est possible que si tous les héritiers sont d’accord.

Si l’héritier ne se manifeste pas, cela signifie qu’il accepte sous bénéfice d’inventaire.

Le fait d’accepter la succession sous bénéfice d’inventaire signifie que l’héritier n’acceptera sa part de l’héritage que sur les actifs et les passifs de la succession inventoriés dans l’inventaire.

II. Procédure

A. Déroulement

A l’ouverture de la succession, l’héritier a un délai d’un mois pour faire sa demande d’inventaire. A ce moment débutera l’inventaire par l’autorité compétente, qui devra l’établir aussi rapidement que les circonstances le permettent. Les créanciers devront présenter leurs créances. Finalement, à la clôture de l’inventaire, les héritiers auront un délai d’un mois pour choisir ce qu’ils feront de ces informations.

B. Précisions

L’inventaire doit porter sur tous les actifs et passifs du défunt et doit avoir accès à toutes les informations de la succession, qu’elles soient confidentielles ou non. Toute personne qui a des informations sur la succession a un devoir de les transmettre à l’autorité. Le défaut d’information entraîne la responsabilité de la personne qui ne l’a pas transmise. Ainsi, si un héritier ne transmet pas à l’autorité une information sur une dette du défunt, il sera responsable et devra donc répondre en dommages-intérêts.

Cependant, si l’héritier a transmis l’information, permettant ainsi à l’autorité de faire une sommation publique (c’est-à-dire un appel aux créanciers pour qu’ils produisent leur créance), et que le créancier ne s’est pas manifesté par sa faute, celui-ci ne pourra plus poursuivre l’héritier pour rembourser sa dette.

Une information sur la clôture de la succession doit également être transmise au public.

III. Conclusion

La demande de bénéfice d’inventaire est une solution qui peut se révéler précieuse pour décider d’accepter ou non une succession. Si le défunt avait trop de dettes, la succession peut simplement être répudiée. Dans le cas contraire, il est possible d’accepter la succession, sous bénéfice d’inventaire ou non. Finalement, la liquidation officielle reste une solution intéressante pour ne pas prendre de risques, ni la charge de devoir liquider la succession (à ce sujet, nous vous invitons à lire notre article à ce sujet).

Pour plus amples informations à ce sujet, les portes de notre étude vous sont ouvertes pour répondre à vos questions. En particulier, si vous avez manqué le délai de bénéfice d’inventaire et que la liquidation d’une succession vous dépasse que ce soit en temps ou compétences, nous sommes à votre entière disposition pour y procéder.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

La répudiation

I. Généralités

Au décès d’une personne s’ouvre la succession. Dès ce moment-là, les héritiers ont des droits et des obligations. Ainsi, ils peuvent recevoir leur part de la succession, mais, en contrepartie, doivent également payer les dettes de la personne décédée.

Si vous faites partie des héritiers légaux (c’est-à-dire les héritiers déterminés par la loi) ou des héritiers institués (c’est-à-dire choisis par le testateur), il peut arriver que vous ne souhaitiez pas recevoir votre part de la succession, ou seulement à certaines conditions. Les raisons sont multiples : si la succession comporte plus de dettes que de biens, si vous avez vous-mêmes des dettes et que vous ne voulez pas utiliser ces biens pour rembourser vos créanciers, si vous voulez faire bénéficier d’autres héritiers de votre part ou encore pour des raisons strictement personnelles.

Diverses solutions s’offrent à vous. Vous pouvez décider de répudier simplement et complètement la succession, demander l’établissement d’un bénéfice d’inventaire ou encore requérir la liquidation officielle de la succession.

Dans cet article, nous discuterons de la première possibilité qui est la répudiation. Par cet acte unilatéral, vous pouvez décider de rendre caduque l’acquisition de votre part de la succession, ce qui signifie que vous ne pourrez pas recevoir votre part, mais que vous n’aurez pas non plus à payer les dettes du défunt. Cette solution peut être particulièrement intéressante si, à la fin de sa vie, la personne décédée avait plus de dettes que de biens.

Remarque : la répudiation ne vous empêchera pas dans certaines situations de devoir rendre des libéralités (donations) que la personne décédée vous a faites. N’hésitez pas à nous consulter pour avoir plus d’informations à ce sujet afin de trouver la meilleure solution applicable à votre cas.

II. Les conditions de la répudiation

Plusieurs conditions sont à réunir pour que vous puissiez répudier la succession.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, pour exercer un droit à la répudiation, il faut premièrement que vous soyez héritier légal ou institué.

De plus, il faut que vous ayez la capacité de répudier. Ceci signifie qu’il faut être majeur et capable de discernement. Si vous êtes mineur ou incapable de discernement, vous pouvez répudier avec l’intervention de votre représentant légal et, le cas échéant, le consentement de l’autorité de protection de l’adulte ou de l’enfant. Pour avoir la capacité de répudier, il faut également pouvoir disposer de ses biens : de ce fait, l’époux marié en communauté de bien doit avoir le consentement de son époux.

Pour pouvoir répudier, le délai de trois mois après l’ouverture de la succession ne doit pas être dépassé. Après ce délai, la succession est réputée acceptée.

Finalement, l’héritier ne doit pas être déchu de son droit de répudier. Ainsi, si le délai a expiré, que la succession a déjà été acceptée ou réputée acceptée (par exemple le fait de gérer les biens de la succession de manière plus importante que ce qui est strictement nécessaire) ou en cas d’actes malhonnêtes comme dissimuler ou s’approprier certains biens, l’héritier n’a plus le droit de répudier et doit accepter la succession.

La répudiation doit se faire par forme écrite ou verbale, à l’autorité compétente de votre canton. La forme écrite doit être privilégiée pour des moyens de preuve.

III. Les effets de la répudiation

Le fait de répudier la succession aura différents effets, selon que vous êtes héritier légal ou institué ou si tous les héritiers légaux répudient.

Si vous êtes un héritier légal et que vous répudiez votre part de la succession, la situation sera traitée comme si vous étiez prédécédé. Ainsi, vos descendants prendront votre place, si vous en avez, ou, si vous n’en avez pas, les autres héritiers de la succession recueilleront votre part.

Si vous êtes héritier institué, votre part n’ira pas à vos héritiers, mais sera dévolue aux héritiers légaux de la succession.

Finalement, si tous les héritiers légaux de premier rang (c’est-à-dire les héritiers les plus proches de la personne décédée) répudient la succession, la succession ne passe pas aux héritiers de deuxième rang, mais ira directement à l’office des faillites. S’il reste un montant, ce montant sera distribué aux héritiers comme s’ils n’avaient pas répudié la succession.

Il existe aussi une protection des créanciers de la succession ou de la personne ayant répudié. Si la personne qui a répudié a elle-même des créanciers, ceux-ci peuvent ouvrir action pour rembourser leurs créances sur la part de l’héritier répudiant. S’il reste un solde, celui-ci va revenir aux personnes qui ont pris la place de l’héritier répudiant. Les créanciers ont six mois pour ouvrir action.

Si la succession a des dettes, par exemple liées aux obsèques, et que celles-ci ne peuvent pas être remboursées sur la masse successorale, les créanciers peuvent aller chercher l’héritier répudiant qui a reçu du vivant du testateur un bien qui aurait fait partie de la succession. Dans ce cas, tous les héritiers doivent répondre solidairement : ainsi, l’héritier répudiant ne va pas répondre de l’entier de la dette successorale, mais uniquement du montant de l’avancement d’hoirie.

IV. Conclusions

La répudiation est une institution juridique qui peut être très utile selon les circonstances. Cependant, cet acte peut être assez compliqué à appréhender psychologiquement pour les héritiers, surtout si ceux-ci étaient proches du défunt. De ce fait, d’autres solutions peuvent être recommandées dans ces situations, comme le bénéfice d’inventaire ou la liquidation officielle. En plus des articles à ce sujet que vous pourrez retrouver sur notre blog, nous vous invitons à nous rencontrer pour vous donner plus d’informations sur ces institutions, afin d’agir au meilleur de vos intérêts.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

La procédure de poursuite

Une de mes connaissances me doit de l’argent. Cependant, il ne veut pas me le rendre. Que dois-je faire pour le mettre en poursuite ? Peut-il refuser de me dédommager et faire opposition ? Que devrai-je faire le cas échéant ?

Pensez aussi à consulter le site de votre canton : https://www.fr.ch/opf

I. Poursuite

A. Généralités

Lorsqu’une personne, qu’elle soit physique ou morale (c’est-à-dire qu’il s’agisse d’un être humain ou d’une société, association ou tout autre groupement de personnes ou de capitaux), doit de l’argent à une autre, la première peut faire l’objet d’une poursuite.

Il existe trois sortes de poursuites : la poursuite pour faillite, la poursuite en réalisation de gage et la poursuite par voie de saisie. La poursuite pour faillite n’est possible que pour une association, une fondation ou une société inscrite au registre du commerce. La poursuite en réalisation de gage a pour objet une créance garantie par un gage. Dans les autres cas, la poursuite se fera par voie de saisie.

B. Commandement de payer

La première étape de la poursuite est la notification du commandement de payer.

Il existe plusieurs situations menant à un commandement de payer. Si le débiteur (c’est-à-dire la personne qui doit l’argent) avait une date précise pour s’exécuter, il est alors mis en demeure simple. Sinon, l’obligation est exigible dès l’interpellation du créancier (c’est-à-dire la personne à qui le débiteur doit de l’argent).

Dès l’expiration de ce délai ou l’interpellation, des intérêts peuvent être exigibles (5% au moins, ou plus si le contrat le stipule). Le créancier doit fixer ou faire fixer par l’autorité compétente un délai convenable pour s’exécuter. Si le débiteur ne s’exécute pas à la fin de ce délai, il est alors mis en demeure qualifiée.

Bernard a prêté à Jean-Claude CHF 5’000.- pour l’aider à remonter la pente après un coup dur. Ceux-ci signent un document attestant du prêt. Cependant, Bernard a bien précisé à son ami qu’il souhaitait récupérer cet argent avant le 1er juin, car après cela il en aurait besoin. Le 2 juin, Jean Claude n’a toujours pas rendu l’argent. Bernard lui envoie donc un courrier recommandé pour lui signifier qu’il souhaite recevoir son argent, au plus tard le 1er juillet. Jean-Claude ne s’exécute pas.

Si le créancier intente une action contre le débiteur, il adresse une réquisition de poursuite à l’office des poursuites. Il doit alors donner plusieurs éléments : son nom et domicile, celui de son débiteur, le montant de la créance ou des sûretés exigées, ainsi que le taux et le jour duquel courent les intérêts, ainsi que le titre prouvant la créance, et la date de celui-ci. S’il n’existe pas de titre, le créancier doit donner la cause de l’obligation.

Dès la réception de la réquisition de poursuite, l’office rédige le commandement de payer qu’il notifie au débiteur, avec un deuxième exemplaire pour le créancier. Le commandement de payer doit contenir les informations données par le créancier, les différents délais pour payer ou faire opposition (20 jours pour le paiement et 10 jours pour l’opposition) et un avertissement en cas de non-exécution de la dette (la poursuite suivra son cours par la saisie des biens nécessaires).

Pendant le délai d’opposition, le créancier peut être amené présenter tous les moyens de preuve de sa créance afin de montrer la véracité de ses dires.

Bernard a réellement besoin de son argent. Il réquisitionne donc l’office de poursuite de son canton en indiquant tous les éléments nécessaires. Il reçoit donc, comme Jean-Claude, le commandement de payer quelques jours après.

II. Opposition

Si le débiteur décide qu’il veut faire opposition, il doit informer immédiatement la personne qui lui remet le commandement de payer, ou dans les dix jours l’office des poursuites, à compter du moment où il a reçu l’acte. Il n’est pas obligé de motiver l’opposition.

Dès le moment où l’opposition est indiquée à l’office des poursuites, la poursuite est suspendue.

Jean-Claude estime qu’il n’a pas à rendre cet argent et décide de faire opposition. Il en informe donc l’office des poursuites trois jours après avoir reçu le commandement de payer.

III. Mainlevée

Le créancier qui fait l’objet d’une opposition doit faire reconnaître son droit. Plusieurs manières s’offrent à lui.

A. Mainlevée définitive

Le créancier peut ainsi faire reconnaître son droit de manière définitive (soit par mainlevée définitive) à l’aide d’un jugement ou d’un acte reconnaissable comme tel (une transaction ou reconnaissance passée en justice, des titres authentiques exécutoires, des décisions d’autorités administratives suisses…)

Ainsi, au moment de l’opposition, un créancier dont la reconnaissance de dette n’a pas été reconnue en justice devra agir parallèlement en justice par procédure civile ou administrative, selon qu’il s’agit d’une affaire de droit privé ou de droit public.

Après la reconnaissance de la mainlevée définitive commence la phase de la saisie.

B. Mainlevée provisoire

Le créancier peut également faire reconnaître son droit de manière provisoire si la créance se base sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé (c’est-à-dire un document signé par les parties pour reconnaître et régler une relation contractuelle).

Bernard n’entend pas se faire avoir ainsi par son ancien ami. Il requiert alors une mainlevée provisoire pour faire reconnaître la créance ressortant de la reconnaissance de dette signée par lui-même et Jean-Claude.

Lorsque la mainlevée provisoire est accordée, le créancier peut, après le délai de paiement, requérir la saisie provisoire ou demander au juge de procéder à l’inventaire en cas de faillite. Dans les 20 jours, le débiteur peut intenter une action en libération de dette, et ainsi prouver que les prétentions du créancier ne sont pas fondées.

S’il n’intente pas cette action ou s’il est débouté dans son action, la mainlevée et, si elle est déjà commencée, la saisie provisoire devient définitive.

Malgré la tentative de Jean-Claude, la reconnaissance de dette qu’ils avaient conclue a été reconnue par le juge. De ce fait, la mainlevée est définitive et ses biens seront donc saisis et réalisés pour rembourser Bernard.

IV. Saisie, faillite ou réalisation de gage

Si le commandement de payer ne fait pas l’objet d’une opposition ou si celle-ci échoue, l’office des poursuites, après réception de la réquisition de continuer la poursuite, procède à la saisie, à la faillite de la société, fondation ou association ou à la réalisation du gage.

Dans le cas de la saisie, certains biens sont insaisissables, comme les objets réservés à l’usage personnel du débiteur ou de sa famille (vêtements, effets personnels, ustensiles de ménages…), les animaux domestiques, les denrées alimentaires, les prestations d’assurances ou encore les rentes vieillesse.

D’autres biens, comme les revenus du travail ou les pensions, sont saisissables jusqu’au montant nécessaire pour la survie de la famille.

Lors de la saisie, le juge saisira les biens nécessaires à rembourser les créanciers.

Lors de la réalisation du gage, celui-ci est vendu.

Concernant la faillite, elle sera déclarée si les conditions sont remplies. Les biens seront alors saisis.

V. Réalisation des biens et distribution des deniers

Après la saisie, le créancier peut requérir à la réalisation des biens saisis. Ainsi, ces biens seront vendus pour permettre aux créanciers de recevoir leur argent.

L’argent sera alors distribué entre les créanciers pour rembourser les différentes dettes du débiteur.

Bernard, suite à la saisie et la vente de la voiture de Jean-Claude, a récupéré son argent.

VI. Conclusions

En cas de problèmes de dettes et de prêts, il peut être parfois compliqué de récupérer son argent, surtout si des relations amicales ou familiales rentrent en jeu. Il est donc judicieux de se tourner vers une personne de confiance tel que son avocat pour effectuer les démarches.

Lors de la conclusion d’un contrat de prêt, il est très important de faire signer à l’autre personne un document attestant qu’elle vous doit cet argent, sinon il peut être compliqué de prouver que vous avez bien prêté cet argent et qu’il n’a pas été remboursé.

Attention toutefois à ne pas considérer les la procédure de poursuite comme un réflexe automatique. Dans beaucoup de cas, vous perdrez simplement votre temps et votre argent si cette voie est d’emblée vouée à l’échec. Il est souvent plus pertinent de mettre ses forces et surtout son argent dans une procédure préalable de conciliation judiciaire, que dans une poursuite vouée à l’échec. Là encore les conseils d’un professionnel rompu à ces questions de recouvrement permettent bien souvent d’économiser du temps et de l’argent.

A noter que l’état met à disposition de nombreux formulaires dans ce domaine. https://www.fr.ch/opf/institutions-et-droits-politiques/justice/formulaires

Nous vous conseillons volontiers.

Co-écrit par Albertine Necker (Présidente ELSA, étudiante en 3ème année de droit)

LCR/LCA – Réduction des prestations d’assurance pour faute grave

Je remercie mon ami Philippe Baro pour les illustrations très à propos. N’hésitez pas à aller voir son travail www.graffeur.ch

Si la plus part des assurés optent pour des formules avec « renonciation faute grave », peu d’entre eux prennent réellement le temps de lire les conditions générales qui réservent presque toutes des cas d’exclusions de cette fameuse renonciation faute grave suivant la nature de la faute grave commise. Dans un tel cas, il est important de savoir que l’assureur pour se retourner malgré tout contre son assuré, avec des conséquences financières souvent dramatiques.

Quand est-ce que l’assureur exerce son droit de recours ?

L’art. 65 al. 1 LCR prévoit que dans la limite des montants prévus par le contrat d’assurance, le lésé peut intenter une action directe contre l’assureur. L’art. 65 al. 2 LCR prévoit que les exceptions découlant du contrat d’assurance ou de la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d’assurance ne peuvent être opposées au lésé. Au regard de l’art. 65 al. 3 LCR, l’assureur a un droit de recours contre le preneur d’assurance ou l’assuré dans la mesure où il aurait été autorisé à refuser ou à réduire ses prestations d’après le contrat ou la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d’assurance. L’assureur est tenu de recourir si les dommages ont été causés alors que le conducteur se trouve en état d’ébriété ou dans l’incapacité de conduire, ou qu’il commet un excès de vitesse au sens de l’art. 90, al. 4 LCR. L’étendue du recours tient compte du degré de culpabilité et de la situation économique de la personne contre laquelle le recours est formé.

Le montant de la prétention récursoire correspond à la surindemnisation du lésé (ATF 91 II 226 consid. 1). En pratique, dès lors que l’assureur RC se trouve devant l’impossibilité d’opposer les exceptions et les objections découlant de la LCA ou du contrat d’assurance au lésé, il subit un dommage financier correspondant à la différence entre ce qu’il a payé à la victime (art. 58 et 62 LCR) et ce qu’il aurait dû payer s’il avait pu opposer au lésé toutes les exceptions et les objections.

L’art. 83 al. 2 LCR prévoit que les recours que peuvent exercer entre elles les personnes civilement responsables d’un accident impliquant des véhicules automobiles, des cycles ou des engins assimilés à des véhicules, ainsi que les autres droits de recours prévus par la présente loi, se prescrivent par trois ans à compter du jour où la prestation est complètement effectuée et les responsables connus.

L’art. 88 LCR règle le recours de l’assureur contre la personne civilement responsable du dommage causé par l’emploi d’un véhicule à moteur ou contre l’assureur de la responsabilité civile encourue par cette personne. Dans un arrêt du 11 octobre 1967 (RO 93 II 407), le Tribunal fédéral a jugé que l’art. 88 LCR n’autorisait le recours que dans la mesure où le lésé avait d’abord été indemnisé jusqu’à concurrence de son dommage effectif total, même si l’indemnité due par la personne civilement responsable ou son assureur devait être réduite, par exemple en raison d’une faute imputable à la victime.

Qu’est-ce qu’il faut entendre par faute grave ?

Art. 65 al. 3 LCR et 14 al. 2 LCA

L’art. 14 al. 2 LCA prévoit que si le preneur d’assurance ou l’ayant droit a causé le sinistre par une faute grave, l’assureur est autorisé à réduire sa prestation dans la mesure répondant au degré de la faute. Elle est également stipulée dans les CGA de l’assurance. Sont notamment visées les trois hypothèses expressément mentionnées par l’art. 65 al. 3 LCR (CS CR commenté‑Bussy/Rusconi/Jeanneret/Kuhn/Mizel/Müller, art. 65 LCR N 3.7 ss).

Selon la jurisprudence, commet une faute grave celui qui viole un devoir élémentaire de prudence dont le respect s’impose à toute personne raisonnable placée dans la même situation (ATF 119 II 443 consid. 2a). La faute grave ne s’oppose pas seulement à la faute légère, mais aussi à la faute intermédiaire ou moyenne (ATF 100 II 332 consid. 3a), qui n’est pas suffisante pour justifier l’application de l’art. 14 al. 2 LCA (arrêt non publié 4C.314/1992 du 11 décembre 2001, consid. 6b). Elle doit qualifier un comportement inexplicable à l’évidence et provoquer une réaction de surprise chez autrui (« Comment peut-on agir ainsi ! ») (Arrêt du TF 5C.175/2003 du 24.02.2004 consid. 5.1).

Art. 37 LAA

Concernant la faute grave de la circulation en lien avec l’art. 37 LAA, la notion de faute grave de l’art 37 LAA est plus large que celle de la violation grave d’une règle de la circulation au sens de l’art.90 al. 2 LCR, laquelle suppose un comportement sans scrupules ou du moins lourdement contraire aux règles de la circulation, c’est-à-dire une faute particulièrement caractérisée (CS CR commenté ‑Bussy/Rusconi/Jeanneret/Kuhn/Mizel/Müller, ad art. 65 LCR N 3.7.5 ss ; ATF 102 V 23 consid. 1).

Taux de réduction des prestations :

En matière de circulation routière, il a été considéré comme violant les règles élémentaires de la prudence dans les cas suivants :

– 25% de réduction le fait de conduire en étant ivre à une vitesse excessive (ATF 120 II 58) ;

– 30% de réduction le fait de conduire dans un état de fatigue avancé (TF du 05.03.1984, RBA XV n° 27, p. 161) ;

– 50% de réduction pour la perte d’attention par rapport au trafic (voiture arrêtée au bord de la route et mise en évidence par un signal de panne) (TC/VD du 10.12.1968, RBA XIII n° 74, p. 355) ;

Dans l’ATF 114 V 315 consid. 5b, plusieurs cas sont énumérés en matière de réduction des prestations pour violation des règles de la circulation routière :

– 10% de réduction en cas de dépassement de la ligne d’arrêt à un carrefour offrant une faible visibilité (jugement M. non publié du 23 août 1967) ;

– 20% de réduction pour un automobiliste perdant la maitrise de son véhicule sur une route enneigée et comportant de nombreux virages (ATF 97 V 210) ;

– 10% de réduction pour un automobiliste qui ne circulait pas suffisamment à droite et à une vitesse inadaptée dans un virage abrupt et peu visible (RSKV 1972 n° 116 p. 15) ;

– 10% de réduction pour un dépassement à une vitesse de 80 km/h malgré́ le trafic en sens inverse (jugement non publié p. 13 mars 1972) ;

– 20% de réduction pour une perte de maitrise du véhicule à une vitesse de 130 km/h dans un virage dangereux (arrêt C. non publié du 27 décembre 1973) ;

– 10% de réduction en cas de violation de plusieurs règles de la circulation (dépassement à une vitesse de 80 km/h d’un automobiliste hésitant voulant bifurquer à gauche) (arrêt p. non publié du 7 octobre 1976) ;

– 10% de réduction pour un automobiliste qui a dérapé́ sur le verglas à une vitesse de 50 km/h (arrêt R. non publié du 27 décembre 1976) ;

– 20% de réduction pour un fou du volant notoire (arrêt U. non publié du 16 mai 1977) ;

– 10% de réduction en raison d’une brève inattention causant un accident (arrêt R. non publié du 5 octobre 1978) ;

– 10% de réduction en raison d’une erreur d’appréciation du trafic (jugement Z. non publié du 24 juin 1981) ;

– 10% de réduction pour un automobiliste qui n’a pas circulé suffisamment à droite alors qu’il bifurquait à gauche et n’a pas fait preuve de l’attention requise (arrêt M. du 19 juillet 1982, cité dans l’annexe juridique du rapport annuel 1982 de la SUVA, n° 1) ;

– 10% de réduction lors d’un refus de priorité (arrêt B non publié du 1er février 1983) ;

– 20% de réduction pour un automobiliste qui, alors que la route et la météo étaient défavorables, s’est dirigé vers un virage à droite qu’il savait étroit sans bien rester sur sa droite (arrêt non publié p. du 26 mai 1983) ;

– 10% de réduction pour un motard qui roulait à 100-110 km/h sur un parcours qu’il connaissait et qui a perdu l’équilibre dans un virage à gauche sans influence étrangère (arrêt A. du 30 janvier 1984 dans le supplément juridictionnel du rapport annuel 1984 de la SUVA, n° 6) ;

– 20% de réduction pour un motard qui dépasse à une vitesse inadaptée une voiture garée malgré le manque de visibilité et le trafic en sens inverse (arrêt non publié p. du 16 mai 1984) ;

– 20% de réduction en raison d’une vitesse inadaptée aux conditions (orage, averse, route mouillée, virage) (jugement W. non publié du 21 mars 1985) ;

– 10% de réduction pour le non-port de la ceinture de sécurité (ATF 109 V 150 ; ATF 104 V 36 ; RKUV 1986 n° U 9 p. 343).

L’art. 37 al. 2 LAA a donné lieu à la casuistique suivante :

– 20% de réduction en cas de manœuvre de dépassement à vive allure sur une route départementale par un poids lourd qui entre en collision avec une voiture (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 289/06 du 20 septembre 2007) ;

– 10% de réduction lors d’un accident survenu à la suite d’un freinage pour éviter un chevreuil, sur une chaussée partiellement enneigée et verglacée (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 349/04 du 20 décembre 2005) ;

– 20% de réduction pour une assurée ne portant pas la ceinture de sécurité, qui lors d’un dépassement à 120 km/h sur une autoroute par temps couvert avec un mélange pluie-neige a perdu la maîtrise de son véhicule après avoir donné un coup de volant pour éviter l’automobiliste qui s’était déplacé sur sa voie (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 212/05 du 1er février 2006) ;

– 10% de réduction pour un motard dépassant plusieurs véhicules dans un village à une vitesse inadaptée aux circonstances selon un témoin, qui n’a pas eu le temps de se rabattre sur le côté droit de la chaussée et a perdu la maîtrise de sa moto (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 31/02 du 17 mars 2003) ;

– 10% de réduction pour un refus de priorité à un automobiliste s’engageant sur une route principale (ATF 121 V 321 consid. 4a) ;

– 20 % de réduction pour un cycliste qui franchit une double ligne de sécurité et entre en collision avec un véhicule roulant en sens inverse (arrêt du Tribunal fédéral 8C_881/2014 du 12 mai 2015) ;

– 20% de réduction pour un automobiliste en état d’ébriété qui, dans un virage, roule sur la voie inverse et percute un arbre (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 346/04 du 29 juin 2005) ;

– 20% de réduction pour un assuré qui roule sous l’influence de l’alcool à une vitesse inadaptée aux conditions de la route (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 346/04 du 29 juin 2005) ;

– 20% de réduction pour un assuré qui cause un accident sur l’autoroute en état d’ébriété (1,28 g/kg) et sous l’influence de la cocaïne (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 186/01 du 20 février 2002) ;

– 20% de réduction pour un motard ayant roulé à une vitesse excessive en ayant consommé du cannabis peu avant l’accident (ATF 126 V 353).

L’art. 37 al. 3 LAA a donné à la casuistique suivante :

– 30% de réduction pour un assuré qui avait une concentration de THC de 8μg/l dans le sang au moment de l’accident, dépassant d’au moins cinq fois la valeur limite fixée par l’office fédéral des routes (Arrêts de la Cour de Justice de la Chambre des assurances sociales du 20 mars 2018 A/4051/2017).

– 30 % de réduction pour un assuré qui avait une concentration de THC de 3,0 μg/l dans le sang au moment de l’accident (Sozialversicherungsgericht des Kantons Zürich vom 8 September 2014 UV.2013.00260).

Taux de réduction du degré d’alcoolémie

Echelle de réduction du degré d’alcoolémie

Avant l’entrée en vigueur (le 1er janvier 2005) du nouvel art. 91 al. 1 LCR, l’ancien Tribunal fédéral des assurances avait maintes fois confirmé la pratique des assureurs-accidents, notamment la CNA, qui faisait dépendre le taux de réduction du degré d’alcoolémie selon l’échelle suivante : entre 0,8 et 1,2g o/oo, la réduction est de 20% ; elle augmente de 10% pour chaque 0,4g o/oo d’alcoolémie supplémentaire (ATF 120 V 224 consid. 4c). L’abaissement du taux limite d’alcoolémie à 0,5g pour mille n’a pas modifié cette pratique et la jurisprudence rendue à son propos reste donc valable (TF 8C_252/2012 du 30 novembre 2012).

Alcoolémie minimale ou maximale ?

L’importance de l’intervalle entre l’alcoolémie minimale et maximale, est due au calcul rétrospectif nécessité par l’écoulement du temps entre le moment déterminant et la prise de sang, ce calcul impliquant la prise en compte, d’une part, du taux d’élimination de l’alcool le plus favorable, et d’autre part, du taux le moins favorable. En effet, plus le laps de temps entre le moment déterminant et la prise de sang est long, plus l’écart entre l’alcoolémie minimale et maximale devient important sous l’influence du taux d’élimination le plus et le moins favorable. L’existence d’un tel écart est inhérente au système, la prise de sang ne pouvant forcément qu’être effectuée un certain temps après le moment déterminant. Selon la jurisprudence rendue en matière pénale, lorsque l’analyse de sang a pu être effectuée à satisfaction scientifique, le juge ne saurait s’en écarter. En particulier, il est tenu de respecter le cadre défini par l’analyse, autrement dit les valeurs minimale et maximale d’alcoolémie qu’elle fixe. En revanche, aucune disposition légale n’impose en elle-même au juge de retenir l’alcoolémie la plus faible mentionnée dans l’analyse (ATF 129 IV 290 consid. 2.7). Quand il s’agit de fixer le taux d’alcoolémie de l’assuré en matière de réduction des prestations il est admissible de se fonder sur un taux moyen, en l’absence d’indications plus précises, notamment d’éléments de fait ressortant d’un jugement pénal (Arrêt U 394/05 du 10 novembre 2006 consid. 3.3).

Excès de vitesse

Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d’assurer l’égalité de traitement. Ainsi, le cas est objectivement grave au sens de l’,art. 90 al. 2 LCR, sans égard aux circonstances concrètes, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l’intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (,ATF 132 II 234 consid. 3.1, ,JdT 2006 I 408 ; ,124 II 259 consid. 2b, ,JdT 1998 I 695 ; ,123 II 106 consid. 2c, ,JdT 1997 I 727).

Ces règles ne dispensent toutefois pas l’autorité de l’examen des circonstances du cas concret, dans la mesure où une appréciation purement schématique du cas, fondée uniquement sur le dépassement de vitesse constaté, violerait le droit fédéral (TF 1C_55/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1). Ainsi, l’importance de la mise en danger et celle de la faute doivent être appréciées, afin de déterminer quelle doit être la durée d’un retrait de permis (art. 16 al. 3 LCR). Par ailleurs, il y a lieu de rechercher si des circonstances particulières ne justifient pas de considérer le cas comme plus grave ou, inversement, de moindre gravité (TF 1C_55/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1).

Autorité administrative et le jugement pénal

Le jugement pénal ne lie en principe pas l’autorité administrative. Toutefois, afin d’éviter dans la mesure du possible des décisions contradictoires, la jurisprudence a admis, s’agissant de se prononcer sur l’existence d’une infraction, que l’autorité administrative ne devait pas s’écarter sans raison sérieuse des faits constatés par le juge pénal ni de ses appréciations juridiques qui dépendent fortement de l’établissement des faits, en particulier lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d’une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés (ATF 136 II 447 consid. 3.1 ; 124 II 103 consid. 1c/bb ; 123 II 97 consid. 3c/aa). L’autorité administrative ne peut dès lors s’écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait que le juge pénal ne connaissait pas ou qu’il n’a pas prises en considération, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés ou si ce dernier n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 ; 136 II 447 consid. 3.1). Cette dernière hypothèse recouvre notamment le cas où le juge pénal a rendu sa décision sur la seule base du dossier, sans procéder lui-même à des débats (ATF 136 II 447 consid. 3.1).

Conclusions

Nul n’est à l’abri d’un écart de conduite. Devant les assurances, seule l’assistance de professionnels rompus à ces négociations peut permettre de limiter la casse. Nous sommes à votre service à première demande.

Néanmoins, avant de prendre le volant, le guidon ou tout autre engin avec un verre de trop, sous l’influence de substances illicites, voire même ne serait-ce qu’avant de simplement entamer un dépassement en vous disant que ça devrait passer, demandez-vous si ça vaut la peine de pour cela de payer des indemnités jusqu’à la fin de vos jours…

Co-écrit par Albulan Serifi, avocat-stagiaire auprès de l’Etude Ferraz